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Victoria-Eugénie de Battenberg avait tout d’une princesse de conte de fées. Mais ces histoires que l’on croit parfumées à l’eau de rose ont aussi leurs zones d’ombres. Avant d’atteindre sa vingtième année, la petite-fille de Victoria du Royaume-Uni avait déjà connu son lot de tragédies. Orpheline de père alors qu’elle n’était qu’une enfant, elle ignorait que le pire était encore à venir.

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Tout avait pourtant commencé comme dans un rêve. En quête d’une épouse, le jeune roi Alphonse XIII d’Espagne s’était rendu en Angleterre en 1905. Parmi l’aréopage des petites-filles de la défunte impératrice des Indes, la princesse Patricia « Patsy » de Connaught, fille du prince Arthur de Grande-Bretagne et de la princesse Louise-Marguerite de Prusse, faisait figure de favorite. Mais elle n’était pas du tout intéressée et le fit rapidement comprendre.

Alphonse XIII n’insista pas, d’autant qu’une autre princesse avait attiré son regard.

  • Qui est cette jeune femme qui a les cheveux presque blancs ? a-t-il demandé à la princesse Hélène de Grande-Bretagne, princesse Christian de Schleswig-Holstein.

Le regard pénétrant du roi fit rougir la jeune princesse Ena. Ce fut le coup de foudre. Ils se rencontrèrent trois fois durant ce séjour d’une semaine, et ne purent converser librement qu’au cours de leur dernière rencontre, dans le cadre d’un bal au palais de Buckingham. Ena ne parlait pas espagnol, Alphonse maîtrisait mal l’anglais. Les tourtereaux discutèrent donc en français. C’est dans la langue de Molière qu’ils évoquèrent sagement leurs centres d’intérêts, décidèrent d’entamer une correspondance et de s’envoyer des cartes postales.

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A Madrid, la reine-mère Marie-Christine ne voyait pas l’idylle naissante d’un très bon œil. Née archiduchesse d’Autriche, fervente catholique, elle ne goûtait guère l’idée d’une belle-fille d’origine protestante. En outre, l’ascendance morganatique du père de la Dulcinée du roi ne faisait que compliquer les choses. Elle exigea de son fils qu’il jetât son dévolu sur une promise ayant un meilleur pédigrée, mais le roi tint bon.

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Tandis que fleurissait leur correspondance, Ena prit, de son propre chef, des cours d’espagnol. N’ayant, au début, pas de professeur pour lui enseigner la langue de Cervantès, elle se mit à l’apprendre dans des livres, et ce avec les difficultés qu’on imagine.

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Victoria-Eugénie de Battenberg et Alphonse XIII se retrouvèrent à Biarritz en janvier 1906. C’est là que les deux amoureux se fiancèrent officieusement. Il restait encore des formalités à accomplir : la future épouse du Roi Catholique devait se convertir à la foi romaine. Dans chaque pays, cette démarche fut accueillie avec des murmures réprobateurs, en particulier en Angleterre. L’évêque de Londres et l’archevêque de Cantorbéry ne se privèrent pas d’informer le roi Édouard VII, oncle de la fiancée, du mécontentement public que cette perspective faisait naître. Dans l’atmosphère anti-papiste qui embrumait les îles britanniques, la conversion de la princesse faisait presque figure de trahison.

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Passant outre les critiques, Victoria-Eugénie embarqua, à son retour de Biarritz, dans un voyage spirituel vers le catholicisme sous la férule de Mgr Robert Brindle, évêque de Nottingham. Loin d’en faire une simple convention matrimoniale, Ena prit ses cours très au sérieux. Embrasser la foi de son futur mari et de son peuple procédait d’un acte d’amour.

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La cérémonie solennelle de conversion eut lieu le 7 mars 1906, au palais de Miramar à Saint-Sébastien. Contrairement au vœu de la princesse, qui craignait d’être distraite par sa présence, le roi d’Espagne assista à la cérémonie. Il faut dire qu’aucun de ses proches parents ne l’accompagna au cours de cette étape cruciale et éprouvante. Non seulement Victoria-Eugénie dut être rebaptisée, mais aussi abjurer fortement la religion de son enfance. Toute vêtue de blanc, coiffée d’une mantille, la princesse anglo-allemande s’avançait à grands pas vers son destin… (Merci à Actarus)