Le Théâtre des Champs Elysées affiche actuellement la très belle production du Dialogue des Carmélites, de Francis Poulenc, donnée à La Monnaie de Bruxelles en décembre dernier.

Au départ, il s’agit d’une nouvelle écrite par Gertrud Von Le Fort (1876-1971), femme de lettres allemande, amie d’Edith Stein, dont Georges Bernanos s’inspira pour écrire le scénario et les dialogues  d’un film qui ne fut pas réalisé (en tout cas, pas tout de suite). Mais la nouvelle devint une pièce, représentée avec beaucoup de succès en 1952 au Théâtre Hébertot.

Poulenc décida alors à son tour de s’en inspirer pour l’écriture d’un opéra dont le livret fut confié l’Italien à Flavio Testi. C’est cette version remaniée du scénario de Bernanos qui a été créée en 1957, à la Scala de Milan d’abord, puis quelques mois plus tard à l’Opéra de Paris.

Quand  le rideau se lève, nous sommes à Paris en 1789 chez un aristocrate, le Marquis de La Force, à qui sa fille, Blanche, annonce son désir de rentrer au Carmel. Troublé par cette annonce, le marquis comprend néanmoins qu’il ne peut s’opposer au souhait de sa fille, qui, après un entretien avec la Prieure du Carmel, Madame de Croissy, est admise au noviciat, en même temps qu’une autre jeune fille, Constance de Saint-Denis. 

Cependant, très vite, les menaces extérieures se rapprochent et se font pressantes pour les Carmélites. Les ecclésiastiques réfractaires à la constitution civile du clergé de 1791 sont impitoyablement persécutés, les congrégations religieuses sont dissoutes et et à Compiègne, les Conventionnels finissent par prendre possession du Carmel et jeter les religieuses en prison. Toutes sauf deux, Mère Marie de l’Incarnation, seconde prieure du Carmel après la mort de Mme de Croissy, et Blanche de La Force, qui sont parvenues à s’enfuir.

Mais Blanche, jeune fille de nature anxieuse, n’ayant jamais contenu son effroi devant la mort, décide alors de l’affronter et rejoint ses compagnes au moment où celles-ci montent à l’échafaud, en chantant un Salve Regina qui donne le frisson.

Le Dialogue des Carmélites est donc une œuvre où s’entremêlent des émotions intenses: le doute et la confiance, la peur (par exemple l’agonie déchirante de la Prieure) et le courage, la transcendance et la gaité simple et concrète (le personnage de Sœur Constance).

La beauté de la partition de Poulenc, la pertinence de la mise en scène d’Olivier Py, aussi magistrale dans sa compréhension de l’œuvre et de ses enjeux que dans ses parti-pris esthétiques, la qualité intense de l’engagement des chanteuses (Véronique Gens, Sophie Koch, Patricia Petibon, Sabine Devieilhe, Anne-Sophie Von Otter, excusez du peu !), tout concourt à faire de cette soirée d’Opéra un moment impressionnant, rare, et profondément bouleversant. (Merci à Pierre Yves pour cet article)