En 1844, le comte György Karolyi, un aristocrate hongrois fit construire pour être sa résidence d’été une superbe demeure néoclassique au milieu des milliers d’hectares et de plusieurs villages que comprenait sa propriété. Le temps passa. La Première Guerre Mondiale et le catastrophique Traité de Trianon qui la suivit, la Deuxième Guerre Mondiale et l’instauration du régime communiste firent de cette superbe demeure, désertée par ses propriétaires contraints à l’exil, un vaisseau fantôme…

Le château (ci-dessus la Cour d’honneur et la salle à manger en 1900) fut nationalisé en 1945 et servit successivement de lieu de villégiature pour les employés de la Compagnie Nationale du Gaz, puis de lieu d’hebergement pour les enfants des partisans communistes grecs et enfin d’orphelinats pour enfants hongrois abandonnés. En 1979, il menaçait ruine. Ci-dessous, la salle à manger en 1979…

A la suite de la chute du Mur de Berlin et des changements politiques en Europe centrale, la famille Karolyi put enfin retourner en Hongrie au début des années 1990. Le comte Georges Karolyi, arrière-arrière-petit-fils du bâtisseur du château et son épouse Angelica décidèrent de redonner à la propriété son lustre d’antan.

Cependant, contrairement à d’autres pays comme la République tchèque, la loi hongroise ne permet pas la restitution des biens à leurs anciens propriétaires. Fehérvarcsurgo figure en effet sur une liste d’environ 200 monuments historiques majeurs du pays qui aux termes de la loi, sont déclarés inaliénables.

Le comte et la comtesse Karolyi durent trouver un accord avec le gouvernement qui leur consentit un bail emphytéotique d’une durée de 99 ans, à la condition de remettre les bâtimenst en état. De milliers d’hectares, la propriété fut réduite à 50. Et pour sauver le château définitivement, il fallait lui trouver une destination compatible avec le monde actuel et chercher les fonds nécessaires à sa restauration.

Le comte Georges Karolyi, la soixantaine allègre, et son épouse Angelica, tous deux élevés en France et diplômés de Sciences Po, après une carrière luii dans l’industrie française et elle comme documentaliste, surent relever le défi. Il n’était pas question de n’en faire qu’une résidence de famille, il fallait continuer dans l’esprit d’ouverture européenne qui a toujours été celui de la famille Karolyi, liée à toutes les familles princières et aristocratiques de l’Europe et qui en son temps sut accueillir les artistes les plus réputés, comme Franz Liszt.

La création d’un centre culturel de rencontre à vocation européenne, axé sur l’ouverture de la Hongrie à l’Europe et à la démocratie fut décidée. La Fondation Joseph Karolyi, un organisme à but non lucratif de droit hongrois, reconnu d’utilité publique, naquit donc en octobre 1994.

Le comte Joseph Karolyi fut à la fois légitimiste en son temps et démocrate-chrétien en esprit bien en avance sur son temps. Après la Première Guerre Mondiale, il comprit que seule une monarchie reposant sur une tradition historique certaine mais ouverte aux autres, pouvait permettre d’éviter les terribles excès auxquels les années 20 et 30 donnaient naissance. Les racines chrétiennes de l’Europe devaient également lui peremttre de retrouver une unité mise à mal par le conflit.

L’idéal du comte Joseph Karolyi trouva sa réalisation dans les accords conclus après la Deuxième Guerre Mondiale par Konrad Adenauer, Robert Schuman et Alcide De Gasperi qui donnèrent naisance à l’Union européenne. Il est à noter que l’aide apportée, sur sa fortune personnelle par le comte Joseph Karolyi à la Famille impériale d’Autriche en exil lui permit de ne pas être dans la misère après avoir perdu ses trônes. Il sut aussi enseigner la langue hongroise au jeune Otto de Habsbourg, fervent européen, aujourd’hui presque centenaire, unanimement respecté en Europe et toujours reçu en Hongrie avec les honneurs dûs à un chef d’Etat.

Sur base de l’accord conclu avec l’Etat hongrois dans les années 90, la famille commença à investir dans  le château (ci-desus la Cour d’honneur avant la guerre) ses fonds propres et les fonds reçus de différents donateurs en France et à l’étranger qui étaient intéressés à soutenir ce projet. C’est ainsi que la chapelle fut entièrement restaurée par la Fondation et re-consacrée en septembre 1999.

Parallèlement, l’Etat hongrois, propriétaire, poursuivait les travaux de mise hors d’eau et de gros oeuvre qu’il avait déjà commencés dans le but d’arrêter la dégradation et de stabiliser la structre du château (ci-dessus en 1964 lorsqu’il abritait un orphelinat).

Avec l’aide de la Banque de Développement du Conseil de l’Europe et de la Banque hongroise de Développement à ce jour, environ 8 millions d’euros ont été investis. L’achèvement de la restauration du château a été rendue possible par une subvention de l’Union européenne de près de 2 millions d’euros au titre de la promotion de l’attrait touristique du site. D’autres investissement seront évidemment nécessaires pour l’aménagement d’une hôtellerie d’appoint dans le bâtiment des grands communs, ainsi que pour la réhabilitation du parc de 50 hectares et des différentes autres fabriques qu’il contient mais cela, c’est une autre histoire…

François Fejtö, l’historien hongrois auteur du célèbre « Requiem pour un Empire défunt », mise au point quasi définitive de la chute de l’Empire austro-hongrois, légua sa bibliothèque à la Fondation Joseph Karolyi. Un autre fonds d’une valeur documentaire et bibliophilique considérable viendra très prochainement enrichir les collections de la Fondation et garnir les rayonnages de la grande bibliothèque ovale à coupole du château (ci-dessus la terrasse avant la guerre) : il s’agit de la bibliothèque spécialisée en héraldique et généaologie d’un des plus éminents spécialistes mondiaux du sujet, le professeur Szabolcs de Vajay, récemment décédé, dont le fonds a été acquis par l’Association hongroise de l’Ordre de Malte et confié à la gestion de la Fondation Joseph Karolyi.

Ce sont ainsi plus de 15.000 volumes en français, anglais, italien, hongrois et allemand, relatifs à l’Histoire, la philosophie, les religiosn et la culture europenne que les chercheurs peuvent consulter.

Pour les mélomanes, un festival international de Quatuor à cordes, baptisé « Quartettissimo » vient de voir le jour. L’ambassade de France s’est impliquée dans cette nouvelle aventure promise à grand succès.

Grâce à l’intelligence et la ténacité du comte et de la comtesse Georges Karolyi et à la compréhension de Géraldine, Alexandre et Elisabeth (leurs enfants), grâce à l’aide de leurs amis et à l’efficace contribution des organisations européennes et hongroise, Fehérvarcsurgo vit aujourd’hui pleinement le XXIème siècle, sans regret de ses fastes d’antan, tourné sans crainte vers l’avenir.

Fehérvarcsurgo est désormais une étape obligatoree dans tout voyage en Hongrie. Il est possible de résider en touriste ou en chercheur au château dont Georges et Angelica vous feront volontiers les honneurs. (Un tout grand merci à Cosmo pour ses recherches et ses contacts et la réalisation de ce sujet – Un grand merci également au comte et à la comtesse Karolyi – Copyright photos : Comte Karolyi)      

Pour tous renseignements complémentaires : www.karolyi.org.hu – contact : kastely@karolyi.org.hu