C’est une idée qui a germé l’hiver dernier : organiser des journées impériales à Nice avec visites, expositions et conférences. Olivier-Henri Sambucchi et ses équipes de la Ville de Nice ont donc mis en place un calendrier d’activités pour cette fin de mois d’octobre 2017. Par l’aimable entremise de Patrick Germain auteur notamment d’un ouvrage sur l’empereur Charles et l’impératrice Zita, qui lui avait permis à l’époque d’avoir des contacts privilégiés avec des membres de la famille impériale dont l’archiduc Rodolphe, il fut proposé à la fille de ce dernier l’archiduchesse Catharina d’Autriche, auteure d’ouvrages sur la famille impériale, d’animer une conférence ayant pour thème « Ces Autrichiennes, nées pour régner », thème d’un de ses livres.

C’est dans le très bel amphithéâtre du CUM (Centre Universitaire Méditerranéen) situé sur la Promenade des Anglais à Nice que s’est déroulée cette conférence qui a réuni un public nombreux et passionné. L’archiduchesse Catharina, fille du défunt archiduc Rodolphe et de la princesse Gabriele de Wrede, petite-fille de l’empereur Charles et de l’impératrice Zita, était arrivée le matin-même de Genève où elle réside. Noblesse et Royautés eut le grand plaisir de pourvoir la rencontrer en tête à tête en fin de matinée dans l’un des salons de l’hôtel Westminster à Nice. Nous reviendrons au fil des prochains jours sur cette interview.

L’archiduchesse fut introduite par Olivier-Henri Sambucchi dont chacun put apprécier le bagout plein de finesse et de délicatesse vis-à-vis de son hôte impériale. Fine connaisseuse de sa vaste généalogie familiale, l’archiduchesse Catharina prit la parole pendant près de 45 minutes d’un timbre de voix très agréable. Autant dire que l’on pouvait entendre les mouches voler !

L’archiduchesse Catharina revint sur les destinées de Marguerite d’Autriche, répudiée à l’âge de 10 ans par le roi de France (elle avait été confiée à l’âge de 3 ans à la Cour de France pour devenir un jour reine !), renvoyée à la Cour d’Espagne où elle fut un précieux soutien et conseil pour son neveu Charles Quint, avant de prendre la tête des Pays-Bas. Sans postérité, elle fut d’une patience à toute épreuve avec ses neveux et signa ce qui est resté dans l’Histoire comme la « Paix des Dames ». L’empereur Charles Quint connu pour son tempérament d’acier, versa d’abondantes larmes à son décès. Marguerite d’Autriche, petite-fille de Charles le Téméraire, née en 1480 à Bruxelles, s’éteignit à Malines en 1530.

Evocation ensuite d’Isabelle d’Autriche, petite-fille de Charles Quint, qui forma un couple très apprécié en Belgique avec l’archiduc Albert, laissant le souvenir d’une période faste pour l’économie et la culture.

Qui se rappelle de la tragique destinée de Catherine d’Autriche, sœur de Charles Quint, épouse du roi Jean de Portugal qui eut la douleur d’enterrer tous les siens de son vivant dont ses 9 enfants et qui est restée une personnalité ayant marqué l’Histoire de la monarchie au Portugal ?

Avec Patrick Germain et l’archiduchesse Catharina

Gros plan aussi sur le destin d’Anne d’Autriche, mère du roi Louis XIV puis sur Marie Thérèse d’Autriche, épouse du roi Louis XIV, roi Soleil, qui vécut dans les intrigues de Versailles et avec les favorites de son époux. Mariée en 1660 au jeune roi, elle est réputée avoir introduit à la Cour de France le chocolat et la première orange. Elle fut brièvement régente du royaume en 1672.

La reine Marie Thérèse assista à la reconnaissance des enfants illégitimes de son époux qui lui conserva toujours une grande estime et à son décès à Versailles en 1683, il lâcha « Voilà bien le premier chagrin qu’elle me cause ».

L’archiduchesse Catharina parvint parfaitement tout au long de son exposé à tisser un maillage historique entre ces femmes de la maison Habsbourg, rendant la narration certes pointue d’un point de vue historique mais parfaitement fluide de compréhension même si le public présent (au vu des questions ensuite posées) était plutôt un public de connaisseurs.

L’archiduchesse Catharina insista sur l’accomplissement du devoir avec dignité de ces reines, de leur acceptation totale du don de soi pour le bien de leur pays mais surtout de leur nouvelle patrie.

Impossible de conclure sans parler de Marie-Antoinette, fille de l’impératrice Marie Thérèse. L’archiduchesse évoque les derniers instants de la reine Marie-Antoinette, sa dignité jusqu’à sa montée à l’échafaud face à une foule hurlante et hostile, la même qui lors de son mariage l’avait acclamée. La narration des derniers instants de vie de la reine qui a déjà tellement enduré depuis la mort du roi Louis XVI, la séparation d’avec son fils malmené par ses geôliers, accusée de tous les torts y compris de celui d’inceste, éprouvée par un procès qui n’en avait que le nom, souffrant d’atroces hémorragies et ne bénéficiant même pas d’un peu d’intimité dans sa cellule, véritable hall de gare où ses bourreaux défilaient sans cesse en l’insultant. Les propos de l’archiduchesse Catharina sont écoutés dans un silence impressionnant, donnant la chair de poule, tellement ils sont empreints d’une grande émotion.

Il est clair que la mort de Marie-Antoinette est restée une blessure béante au sein de la famille impériale d’Autriche.

L’exposé se conclut par des applaudissements nourris. L’archiduchesse reprend alors la parole pour faire part de toute la profonde tristesse qui a été la sienne lors de l’attentat du 14 juillet 2016 qui a frappé la ville de Nice, se remémorant qu’elle a passé tous ses étés dans la région. Ces mots qui sonnent si vrais, sont très appréciés. Olivier-Henri Sambucchi au nom de l’assistance remerciera l’archiduchesse pour ce témoignage de solidarité et soutien avec les Niçois.

Il s’ensuit des questions-réponses avec la salle. L‘archiduchesse ne manque pas d’évoquer sa grand-mère l’impératrice Zita d’Autriche-Hongrie. Noblesse et Royautés y reviendra plus amplement dans le volet de l’interview de l’archiduchesse Catharina.

L’archiduchesse confie s’être plongée dans l’histoire et l’éducation des filles de l’impératrice Marie Thérèse. Elle a ainsi redécouvert la reine Marie-Antoinette sous un autre jour notamment de par l’influence néfaste à ses yeux de sa mère qui entendait l’influencer à sa manière, ce qui au final perdit d’une certaine manière la reine de France, trop occupée à obéir aux « ordres » de Vienne.

Une personne questionne l’archiduchesse sur son sentiment par rapport au film de Sofia Coppola « Marie-Antoinette ». L’archiduchesse Catharina estime que malgré la qualité indéniable des décors et des costumes, on relève de nombreuses fautes historiques (assumées par Sofia Coppola) et l’on passe dès lors en ayant pris le parti de présenter Marie-Antoinette comme un être purement frivole, à côté de sa vraie personnalité. Si elle fut frivole, ce fut pendant une courte période. Marie Antoinette au contraire s’est totalement révélée comme une femme de grande dignité dans l’épreuve. Tous ceux qui l’ont côtoyée à la Conciergerie en témoignèrent.

D’autres questions portèrent sur l’archiduchesse Marie Louise, épouse de Napoléon I puis duchesse de Parme et sur l’origine du patronyme Habsbourg-Lorraine.

L’archiduchesse en compagnie de Patrick Germain et Laurent de Vargas à l’issue de la conférence

Avec toujours beaucoup de précision, l’archiduchesse se plia à cet exercice d’échanges, riche de par ses connaissances mais aussi de par l’émotion qu’elle a transmise dans ses réponses surtout en évoquant sa grand-mère paternelle l’impératrice Zita. A l’issue de la conférence, plusieurs personnes vinrent la féliciter dont l’archiduc Carl Christian, fils de l’archiduc Rudolf (cousin de Catharina), qui vit avec sa famille à Nice.