Au cours de ce deuxième volet de l’entretien avec l’archiduchesse Catharina, nous aborderons sa famille dont son père le défunt archiduc Rodolphe dont l’archiduchesse parle avec tant de tendresse et d’émotion. L’archiduchesse évoque aussi avec beaucoup de cœur ses frères et sœur.

Noblesse et Royautés : Votre père l’archiduc Rodolphe était le sixième enfant de l’empereur Charles et de l’impératrice Zita d’Autriche-Hongrie. Il avait à peine trois ans lorsque son père s’est éteint sur l’île de Madère. En gardait-il des souvenirs ?

SAI Archiduchesse Catharina d’Autriche : Mon père a le souvenir d’être accueilli à Madère par ses parents qui y avaient été envoyés précédemment. Un cliché illustre ce moment où l’empereur habillé désormais en civil et non plus en uniforme, sort du navire en portant mon père dans ses bras. Ma grand-mère a continué toute sa vie à parler de l’empereur Charles à leurs enfants.

En 2010, à l’église Notre Dame du Sablon, l’archiduchesse Catharina (enceinte de son fils Rodolphe), sa sœur l’archiduchesse Marie-Anna, sa mère l’archiduchesse Gabriele et ses frères les archiducs Siméon et Carl Peter lors des funérailles de leur père

Noblesse et Royautés : Votre père qui était veuf et père de quatre enfants, a épousé votre mère la princesse Gabriele de Wrede en 1971. Pouvez-vous nous parler de vos frères et sœur l’archiduchesse Maria Anna, l’archiduc Carl Peter et l’archiduc Siméon ?

SAI Archiduchesse Catharina d’Autriche : Ma sœur Marie-Anna (1954) a pour ainsi dire vécu dans le monde entier ! Elle est à présent établie à Houston aux Etats-Unis. Elle a magnifiquement élevé ses six enfants (l’archiduchesse Marie-Anna a épousé en 1981 le prince Pierre Galitzine). Ce sont des enfants qui ont tellement voyagé, qu’ils sont ancrés dans la globalité. Un déménagement ne les effraie nullement, s’adapter à un autre pays non plus. Ils ont une ouverture d’esprit incroyable. Ma sœur est depuis le matin sur Skype pour parler avec ses enfants aux quatre coins du monde. Je l’ai accompagnée dans les années 1990 lorsqu’elle s’est installée avec sa famille à Moscou. Ce n’était alors pas évident d’y vivre surtout avec de jeunes enfants. Nous devions notamment faire la file pour nous procurer des produits alimentaires. Mais elle a su y faire face. Je dis toujours que ma sœur est mon meilleur correspondant politique car elle a vécu l’évolution de la Russie, était aux Etats-Unis lors de la dernière campagne présidentielle. C’est une femme très dynamique, très impliquée dans les œuvres de charité et qui fait tout cela avec beaucoup d’humilité.

Mon frère Carl Peter (né en 1955) est celui dont j’étais le plus proche lorsque j’étais petite. Il prenait beaucoup de temps pour moi. Il m’écrivait de longues lettres. Il a aussi beaucoup voyagé pour son travail de consultant. Il a vécu en Amérique du Sud, au Mexique, en Afrique du Sud, en Pologne ou encore en Grande-Bretagne. Il s’est marié en 1998 avec la princesse Alexandra de Wrede qui est une nièce de ma mère. Il l’avait donc côtoyée pendant des années sans savoir qu’un jour elle serait son épouse. Sur l’une de nos photos de famille lorsque nous retrouvions la famille de ma mère, on voit d’ailleurs Alexandra tout près de lui, c’était déjà un signe du destin ! C’était donc très cocasse le jour de leur mariage lorsque ma mère a conduit Carl Peter à l’autel et son propre frère donnant le bras à Alexandra.

Ma belle-soeur avait étudié en Allemagne et était diplômée anesthésiste. Lorsqu’ils se sont installés au Luxembourg, elle a dû repasser des examens pour obtenir des équivalences. Elle est depuis médecin généraliste. C’est une femme très intelligence, très calme, qui parvient à gérer toutes les situations avec beaucoup de naturel et de sérénité. Elle ne se met jamais en avant, parle peu d’elle alors que c’est, je le répète, une personne vraiment très brillante. Ils ont deux superbes enfants Antonia et Lorenz.

Mon frère Siméon (né en 1958) est marié à la princesse Maria Paloma de Bourbon-Deux-Siciles, petite-fille des défunts comte et comtesse de Paris. Ils ont cinq enfants. Ils résident à Vaduz au Liechtenstein mais ma belle-soeur est bien évidemment toujours ravie de retrouver l’Espagne et Madrid. C’est un couple très soudé, une véritable référence. Siméon est celui de notre fratrie qui ressemble le plus à notre père.

Bien que nous vivions à Houston, Vaduz, Luxembourg et Genève et ma mère à Bruxelles, nous passons tous les étés deux semaines tous ensemble. C’est un moment de l’année que nous attendons tous avec impatience et cela permet bien évidemment aussi aux cousins de se revoir. Nous faisons de même un an sur deux à Noël.

Noblesse et Royautés : Pouvez-vous nous parler de votre mère l’archiduchesse Gabriele qui comme l’on dit est l’une des grandes dames du Gotha, qui cultive la discrétion mais qui est très proche de la famille royale belge.

SAI Archiduchesse Catharina d’Autriche : Ma mère a toujours 1000 choses à faire ! Je lui ai déjà proposé de quitter Bruxelles pour s’installer plus près de moi mais elle veut absolument rester à Bruxelles où elle vit depuis 45 ans. Bien que nous ne soyons pas à ses côtés à Bruxelles, elle est très entourée. C’est une personne très indépendante. Cela n’a pas été facile pour elle après le décès de mon père. Elle est en effet très proche du roi Albert et de la reine Paola comme elle le fut avec mon père du roi Baudouin et de la reine Fabiola, de même que du grand-duc Jean et de la grande-duchesse Joséphine-Charlotte de Luxembourg avec qui nous passions des vacances en France.

Ma mère a été très active jusqu’au décès de mon père en 2010 au sein de l’asbl « Aider autrui » qui levait des fonds pour soutenir des projets sociaux dans les pays de l’Est. Le concept était le suivant : un château mis à disposition pour la soirée, des serveurs qui étaient souvent des membres de la noblesse. La formule fonctionnait très bien mais demandait un énorme investissement personnel. Nous étions tous mis à contribution. Nous avons dans nos albums de famille de nombreuses photos de mon père et de ma mère en fin de soirée en train de faire la vaisselle ! Avec la persuasion de ma mère, toute la famille se devait bien évidemment d’être présente à la soirée de gala. L’asbl a été absorbée par la Fondation Roi Baudouin. J’avais donné mes royalties de mon premier livre pour l’association. Mes parents allaient d’ailleurs eux-mêmes sur place pour s’assurer de la bonne destination des fonds.

Noblesse et Royautés : Votre père l’archiduc Rodolphe s’est éteint en 2010 alors que vous attendiez votre troisième fils qui se prénomme Rodolphe comme lui. Pouvez-vous nous parler de lui ?

SAI Archiduchesse Catharina : J’avais l’intention depuis ma première grossesse d’appeler le bébé si c’était un garçon Rodolphe mais pour finir nous les avons prénommés Costantino et Nicolo. Lorsque j’ai su que j’attendais un troisième enfant et de plus un garçon, cette fois-ci c’était tout décidé ! J’en ai parlé avec mon père qui était véritablement fou de joie. Il voulut juste être certain qu’en 2010 ce prénom était « portable » pour un jeune enfant. Il était tellement heureux qu’il l’a annoncé à mes frères et sœur qui du coup se sont dits que s’ils l’avaient su plus tôt que cela lui faisait à ce point plaisir, ils auraient appelé un de leur fils aussi Rodolphe. La santé de mon père a décliné progressivement et j’ai alors fait le choix car j’en avais la possibilité d’être le plus de temps possible à ses côtés. Je ne le regrette absolument pas, bien au contraire. Ce furent des moments très proches. Il me demandait toujours lorsqu’il me voyait « Alors comment va Rodolphe ? » en parlant du bébé.

C’est évidemment difficile de parler de son propre père mais sa principale qualité était sans conteste sa si grande bonté. Il avait une foi inébranlable transmise par sa mère l’impératrice Zita. Il était un être très optimiste, sûr de son fait de par sa spiritualité. Il a toujours été extrêmement jeune d’esprit jusqu’à la fin de sa vie. En fait, il n’a jamais vieilli, il a gardé un humour intact jusqu’au bout. C’était une personne vraiment très gaie qui avait un charme fou.

Noblesse et Royautés : Vos deux aînés sont désormais de jeunes hommes. Sont-ils conscients de l’histoire de leur ascendance ?

SAI Archiduchesse Catharina : Il sont fiers de connaître leur lignée mais à leur âge, ils ont d’autres préoccupations. Mon plus jeune Rodolphe est un jour revenu de l’école en me disant qu’un ami lui avait affirmé que j’étais une princesse. Je le lui confirme et il me lâche « Tu le savais donc ! » (rires)

Il savait que mon grand-père était un empereur mais il n’avait pas vraiment fait le lien. J’essaye de leur inculquer la même éducation aimante que j’ai reçue avec cette reconnaissance de gratitude à ce que la vie vous donne. J’essaye aussi de leur transmettre que notre famille a marqué l’Histoire.