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Le saviez-vous ? Juste à côté de l’imposant Centre Pompidou « Beaubourg » se trouve l’Atelier Brancusi, musée national d’art moderne. Constantin Brancusi est né en Roumanie en 1876. Il est formé à l’Ecole des Beaux-Arts de Bucarest. Il arrive à Paris en 1904 et s’établit successivement dans des ateliers situés dans l’impasse Ronsin aux numéros 8 et 11 dans le 15ème arrondissement. Il est considéré comme ayant poussé la création de l’abstraction sculpturale à son apogée.

Il est cependant assez peu connu, même si Brancusi l’a écrit lui-même dans la préface « Hommage à Rodin », du Quatrième Salon de la jeune sculpture, Paris, 1952,  p.22, que la la Reine Elisabeth de Roumanie, Carmen Sylva, pria même Rodin d’accepter dans son atelier le jeune sculpteur. En se rappelant cet épisode Brancusi écrivit : “L’influence de Rodin fut et reste immense. Tandis qu’il était encore vivant, et que j’exposais à la Nationale des Beaux-Arts dont il était président, des amis et des protecteurs, dont la reine Elisabeth, essayèrent, sans me consulter, de me faire admettre dans son atelier. Rodin accepta de me prendre comme élève. Mais moi je refusais, car il ne pousse rien sous les grands arbres. Mes amis étaient fort gênés, ignorants qu’ils étaient de la réaction de Rodin. Quand ce dernier apprit ma décision, il dit tout simplement : Dans le fond il a raison, il est aussi entêté que moi.”

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En effet, Carmen Sylva se disait une admiratrice farouche d’Auguste Rodin, son « vénéré Maître ». Elle l’invita dans une lettre qu’elle accompagna sa lettre de son volume Les Pensées d’une reine à exposer dans le pavillon français lors de l’Exposition jubilaire de Quarante ans de règne du Roi Carol Ier en 1906. Même si on ne connaît pas la réponse du sculpteur, dans les archives du Musée Rodin à Paris sont conservées plusieurs lettres d’Elisabeth et de la princesse Marie, ainsi que leurs photos peut-être en vue de la commande d’un buste.

Dans une de ces lettres, Carmen Sylva écrivait à Rodin : « Je regarde vos esquisses avec la même joie intense avec laquelle je contemple les dessins de Boticelli pour la Divine Comédie. Ce sont des révélations pour moi…Je suis malheureuse de ne pouvoir admirer vos œuvres que de loin cher Maître, mais même à travers l’imperfection des reproductions j’ai pu jouir de la grandeur de votre pensée qui m’a parfois arraché un cri de joie ! »

Il faut aussi se rappeler le contexte de souvenirs tentés de nostalgie de Brancusi. En cette année 1952, la Roumanie qu’il chérissait par dessus-tout était déjà devenue un république populaire, l’Académie roumaine consultée pour l’occasion et dominée par des esprits passéistes qui ne pouvaient pas comprendre son art ou par rancune de certains de ses membres, refusait le legs de son atelier à l’Etat roumain. Un autre de ses contemporains roumains célèbres vivant à Paris, le compositeur Georges Enesco, un protégé revendiqué de Carmen Sylva et de la reine Elisabeth de Belgique, était malade et privé de ressources de ses biens roumains. Brancusi qui comme Enesco furent honorés auparavant dans leurs pays ne pouvaient que goutter à l’amertume injuste de leurs temps en préférant se rappeler d’autres souvenirs.

En 1956, Brancusi, devenu par la force des choses français, décide de légué la totalité de son atelier avec ses œuvres déjà achevées mais aussi ses outils, sa bibliothèque, ses meubles ou encire ses ébauches à l’Etat France sous la condition que le musée national d’art moderne reconstitue bien son atelier tel qu’il était le jour de sa mort.

C’est Renzo Piano qui fut chargé de reconstituer l’atelier.

L’Atelier Brancusi est ouvert au public gratuitement tous les jours sauf le mardi de 14h à 18 h. L’entrée se fait par la place du Centre Pompidou du côté de la rue Rambuteau. (Un grand merci à Doïna Lemny et à Gabriel Badea-Päun pour sa précieuse aide)