Les cinq souverains de la zone euro ont fêté leur cinquantième anniversaire depuis l’introduction de la monnaie unique en 2002 ou le fêteront dans les prochains mois. L’événement aurait donc pu faire partout l’objet d’une émission commémorative, mais les pièces en euros de leur pays le reflètent de manières très différentes.

Je commencerai par l’Espagne, c’est-à-dire par la pièce de 2 EUR commémorative qu’elle mettra en circulation en 2018 à cette occasion (merci à Jesús Rodríguez, propriétaire de l’image). L’événement est indiqué au bas de la pièce : « 50 aniversario de Don Felipe VI » mais l’effigie du Roi Felipe n’y figure pas. À sa place figure son blason (royaume de Castille, royaume de León, couronne d’Aragon, royaume de Navarre, royaume de Grenade et Anjou, avec la couronne royale et le collier de l’Ordre de la Toison d’Or).

Cette discrétion en ce qui concerne l’image des souverains espagnols était déjà perceptible sur les pièces courantes : là où les Rois des Belges, les Roi/Reine des Pays-Bas et le Grand-Duc de Luxembourg sont présents sur toutes les valeurs de 1 c à 2 EUR, les rois d’Espagne ne sont représentés que sur les pièces de 1 EUR et 2 EUR. Cohérence, donc, dans la timidité, la discrétion, l’effacement.

Aux Pays-Bas, le Roi Willem Alexander a fêté ses 50 ans le 27 avril dernier. L’attitude des Pays-Bas est différente de celle de l’Espagne. Le pays a émis une pièce dite « spéciale », j’en ai parlé en juin dernier, c’est-à-dire qu’il a repris l’effigie des pièces courantes de 2 EUR représentant le Roi Willem Alexander en colorisant tout simplement les étoiles en orange.

Et contrairement à l’Espagne, les Pays-Bas osent l’effigie du Roi.

Au Luxembourg, le Grand-Duc Henri a fêté son 50e anniversaire en 2005. La même année, il fêtait le 5e anniversaire de son accession au trône. Et la même année, le pays célébrait le 100e anniversaire de la mort du Grand-Duc Adolphe. Toutes ces commémorations ont donné naissance à la pièce commémorative de 2 EUR ci-dessous.

Contrairement à l’Espagne, le Luxembourg est tout à fait décomplexé quand il s’agit de montrer les anniversaires liés à la vie des Grands-Ducs. Au hasard et sans souci d’exhaustivité : le 25e anniversaire du Grand-Duc Héritier Guillaume en 2006, ci-dessous,

le 50e anniversaire de la désignation par la Grande-Duchesse Charlotte de son fils Jean en qualité de lieutenant-représentant en 2011, le 100e anniversaire de la mort du Grand-Duc Guillaume IV (père de la Grande-Duchesse Charlotte) en 2012, le 50e anniversaire de l’accession au trône du Grand-Duc Jean en 2014, et j’en passe.

Et en Belgique, rien. Et à Monaco, rien non plus. Aucune pièce commémorative de 2 EUR pour le 50e anniversaire du Roi Philippe en 2010 ni pour celui du Prince Albert en 2008. Il y a bien eu une pièce de collection belge de 100 EUR en or à ce sujet, ci-dessous,

ainsi qu’une pièce de collection monégasque de 20 EUR en or, ci-dessous,

mais, justement, ce sont des pièces de collection en or. Aucune pièce du canal de communication officiel, c’est-à-dire une pièce commémorative de 2  EUR à un prix abordable ou que tout citoyen européen aurait pu obtenir en rendu de monnaie.

Récapitulons. En ordre d’importance décroissant, cette fois, rien à voir avec l’actualité, voici ce qui se passe avec les 50 ans du souverain sur les pièces circulantes en euros :

  • le Luxembourg affiche l’image du souverain,
  • les Pays-Bas recyclent l’image du souverain,
  • l’Espagne affiche l’événement mais pas l’image du souverain,
  • la Belgique et Monaco n’affichent ni l’événement ni l’image du souverain.

Une unité de conception entre les monarchies pour célébrer un événement similaire aurait été une première. Elle n’a pas eu lieu. On peut se consoler en pensant que c’est la diversité qui fait la richesse d’une collection de pièces en euros, et qu’on retrouve cette diversité même parmi les monarchies. (Merci à Sedna)