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Au Luxembourg, le droit national impose de faire figurer l’effigie du Grand-Duc sur toutes les pièces. Dans le cas des pièces commémoratives en euros dont le dessin est commun à plusieurs États, la solution pour faire respecter l’exception grand-ducale, c’est l’image latente.

Trois séries de pièces commémoratives communes à plusieurs États ont été émises à ce jour :

–          en 2007 pour le 50e anniversaire du Traité de Rome (13 États),

–          en 2009 pour le 10e anniversaire de l’Union économique et monétaire (16 États),

–          en 2012 pour le 10e anniversaire de l’euro (18 États).

Il était légalement obligatoire que le Grand-Duc Henri figure sur les pièces luxembourgeoises de ces trois séries. Pour ce faire, le Luxembourg a opté pour la technique de l’image latente, qui n’est pas sans rappeler celle de l’hologramme qu’on trouve sur les documents imprimés, en ce sens qu’on peut y lire plusieurs images en fonction du relief et de l’angle de vue de la pièce. Les images latentes sont donc par définition difficiles à photographier et à reproduire, ce qui rend cette technique intéressante pour lutter contre la contrefaçon : elle a d’ailleurs été utilisée en numismatique longtemps avant l’avènement de l’euro. Ceci dit, je laisse de côté les détails techniques pour me concentrer sur l’effigie du Grand-Duc.

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1. 2007, 50e anniversaire du Traité de Rome

On remarque tout de suite la différence entre la pièce luxembourgeoise et toutes les autres pièces de cette série (ici comme dans les autres exemples, la pièce italienne): le cercle qui se trouve sur la gauche de la pièce luxembourgeoise, sur la page paire du document fondateur. Quand on tourne la pièce ou qu’on intervient sur la source de lumière, on voit s’afficher dans ce cercle le profil du Grand-Duc Henri – on le distingue d’ailleurs bien sur l’image ci-dessus. L’asymétrie de la pièce luxembourgeoise semble témoigner du fait que l’exception grand-ducale n’avait pas été complètement maîtrisée lors de la conception graphique de la première pièce commune.

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2. 2009, 10e anniversaire de l’Union économique et monétaire

C’est une consultation publique via Internet qui avait décidé de l’effigie commune. Nous étions nombreux à suivre l’évolution du scrutin mais nous avons été très peu nombreux à en avoir compris l’issue. Ce serait donc une silhouette humaine stylisée dont le bras gauche se prolonge par le symbole de l’euro, sur un fond de pièce primitive, choisie par quelque 60.000 personnes, qui allait véhiculer la culture de l’euro dans 16 États. Les propos du graveur expliquant que le graphisme représentait « l’aboutissement d’une longue histoire d’échanges commerciaux entre les hommes, allant du troc préhistorique à l’Union économique et monétaire » ont sans doute convaincu certaines personnes, mais ils n’ont pas pu empêcher les mots « ridicule », « canular », « déception » et autres de foisonner dans la presse et sur la toile

Toujours est-il que le Luxembourg devait faire figurer le Grand-Duc Henri sur cette pièce, et c’est toute sa surface intérieure qui a été choisie pour servir d’image latente, comme on le devine ci-dessus.

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3. 2012, 10e anniversaire de l’euro

La pièce représente en son centre le symbole de l’euro sur un canevas circulaire dessinant le monde. La monnaie unique est entourée symboliquement de la finance (tour de la BCE à Francfort), du commerce (navires), de l’industrie (usines), de l’énergie, de la recherche et du développement (éoliennes). L’allégorie est peut-être un peu poussée mais le graphisme, cette fois, est exempt de controverse. Ici, l’image latente du Grand-Duc occupe la place qui correspond au symbole de l’euro.

Le Grand-Duc Henri aura donc vu son effigie en image latente sur une asymétrie touchante et quelque peu artificielle en 2007, puis sur tout le champ d’une pièce que beaucoup de personnes ont perçue comme un naufrage en 2009 avant de la voir épouser les courbes du symbole de l’euro en 2012. (Merci à Sedna pour cet article)