Au coeur de St Petersbourg, à l’angle de la célèbre perspective Newsky et du canal de la Fontanka, caché derrière une longue colonnade,se dresse une résidence impériale moins connue et pourtant importante, le palais Anitchkov. Le palais tire son nom du colonel Anitchkov qui commandait le corps du génie de la Marine qui se situait à cet endroit lors de la construction de St Petersbourg en 1703.

C’est l’impératrice Elisabeth (1709-1761), fille de Pierre-le-Grand, qui confie à l’architecte Bartolomeo Rastrelli en 1741 la construction de ce palais baroque dont elle compte alors faire sa résidence.

En 1754, à l’achèvement des travaux, Elisabeth, qui vient d’entamer la construction du palais d’Hiver, décide d’offrir le nouveau palais Anitchkov à son favori et sans doute époux secret, le comte Alexis Razoumovsky.

En 1771, à la mort de ce dernier, le palais est donné par l’impératrice Catherine II (1729-1796) à son favori du moment, le prince Grigori Potemkine qui va y vivre avec faste.

En 1778, ce dernier charge son architecte Ivan Starov, qui vient déjà de lui construire l’imposant palais de Tauride, de transformer  entièrement la façade et les intérieurs du bâtiment dans le style néoclassique qui triomphe alors et en aménageant un grand portail flanqué par deux guérites du côté de la perspective Newsky. Après le décès de Potemkine en 1791,le palais entre dans le domaine impérial.

En 1803, sous le règne de l’empereur Alexandre 1er(1777-1825), le palais Anitchkov est alors agrandi par l’architecte italien Giacomo Quarenghi qui modifie la colonnade du côté de la Fontanka pour l’harmoniser avec le reste du palais. Mais Quarenghi édifie également une longue aile le long de la perspective Newsky qui va dès lors abriter la Chancellerie de la Maison impériale.

Quant au palais proprement dit, il est dès lors affecté à l’héritier du trône. Sans descendance masculine de son épouse l’impératrice Elisabeth Alexeïvna, Alexandre 1er donne alors l’édifice à son frère le grand-duc Nicolas(1796-1855), alors l’héritier de l’empire, à l’occasion de son mariage, en 1817, avec la princesse Charlotte de Prusse, devenue grande duchesse Alexandra Feodorovna. Les intérieurs sont alors entièrement et somptueusement redécorés et jusqu’à leur accession au trône en 1825, le palais Anitchkov demeure leur résidence officielle.

Dans le plus pur style empire, la chambre de la grande duchesse héritière est dominée par un somptueux lit de bois doré surmonté d’un immense baldaquin circulaire tandis que les murs sont tendus de draperies de soie bleue à l’antique rappelant l’aménagement de la chambre de l’impératrice Joséphine à La Malmaison.

Le cabinet de la princesse opte lui pour un style plus confortable où se mélangent meubles et larges fauteuils gondoles en acajou, portraits de famille en nombre tandis qu’un tapis chamarré « bord à bord » recouvre l’ensemble du parquet.

Situé au cœur de la ville, le long de la perspective Newsky où se croisent fringants équipages et cavaliers de la Garde impériale, le palais Anitchkov, avec ses murs ocre rehaussés de blanc, a fière allure mais demeure modeste au regard de l’imposant palais d’Hiver.

C’est là que la grande duchesse donnera naissance à ses quatre premiers enfants comme on le voit sur ce charmant tableau du peintre anglais George Dawe(1781-1829). Après l’incendie du palais d’Hiver en 1837, il héberge à nouveau pendant deux ans celui qui est devenu empereur sous le nom de Nicolas 1er.

Mais c’est en 1866 que commence une nouvelle étape dans la vie du palais lorsque le grand duc héritier Alexandre Alexandrovitch, petit-fils de l’empereur Nicolas 1er épouse la princesse Dagmar de Danemark et s’installe à son tour au palais Anitchkov. Une nouvelle fois, les décors sont alors intégralement refaits dans le style opulent de l’époque.

En témoigne cette aquarelle du grand salon du palais où se remarque une importante tapisserie des Gobelins ou de cet autre salon aux lourdes boiseries néo-Louis XVI meublé de confortables sièges capitonnés. (Merci à Néoclassique pour cette première partie du sujet consacré au palais Anitchkov)