A sa mort en 1828, l’impératrice douairière Maria Feodorovna lègue le palais et toutes ses collections à son fils le grand-duc Michel Pavlovitch (1798-1849) en précisant dans son testament que toutes les collections doivent être conservées en l’état. Le grand-duc va y vivre en compagnie de sa jeune épouse et cousine, Charlotte de Wurtemberg (1807-1873) dans le souvenir dans le souvenir de cette mère tendrement aimée en conservant pieusement le cadre raffiné qu’elle a amoureusement créé (photo 16).

En 1849, à la mort de ce dernier, sans héritier mâle, le palais revient à son petit-neveu le grand-duc Constantin Constantinovitch (1858-1915) (photo 17).

Père attentif et aimant des dix enfants que lui donnera son épouse Elisabeth de Saxe-Altenbourg (1867-1927) (photo 18), il passe le plus clair de son temps dans son domaine de Pavlovsk dont il conserve également jalousement le décor créé par ses arrière-grands-parents.

Le grand-Constantin jouit d’une admiration universelle au sein du peuple russe. Outre ses qualités militaires, c’est également un grand humaniste, un scientifique avisé qui préside l’académie des Sciences, un homme de lettres ami de nombreux auteurs comme Tchekov ou Dostoievsky, un poète et dramaturge qui traduit les plus grands auteurs étrangers et un mélomane averti. Pavlovsk devient alors un centre de musique renommé avec la construction sur le domaine d’une grande salle de concert, appelée Vauxhall et dans laquelle viennent se produire les plus grands compositeurs du temps : Johann Strauss, Igor Stravinsky, Frantz Liszt ou Mikhail Glinka (photo 19).

 

Voulant faire partager sa passion pour les arts, il ouvre en 18 72 un musée dans le palais qui devient ainsi la première résidence impériale ouverte au public. C’est également le grand-duc Constantin qui fait ériger au centre de la cour au début du XXe siècle la statue de Paul 1er, son grand-père, fondateur du palais. Lors de l’inauguration solennelle, toute la cour est présente à Pavlovsk (photo 20).

Oncle et fidèle soutien de l’empereur Nicolas II, cet humaniste éclairé assiste impuissant au déclenchement de la première guerre mondiale. Très affecté par la mort au front dès le début du conflit de l’un de ses fils, le prince Oleg, au début des hostilités, le grand-duc Constantin s’éteint dans son cher domaine de Pavlovsk le 2 juin 1915. Il sera le dernier membre de la famille impériale à avoir des funérailles impériales d’Etat dans le mausolée des grands-ducs de la forteresse Pierre-et-Paul (photo 21).

Nationalisé après la Révolution d’octobre 1917, par bonheur, un ancien officier de l’empereur nommé Alexander Polovtsov et resté en Russie par attachement à son pays, va s’efforcer de sauvegarder Pavlovsk afin d’empêcher le pillage ou la dispersion de cet exceptionnel ensemble dont les décors étaient restés inchangés depuis Paul 1er et Maria Feodorovna. Nommé « Commissaire du Peuple », grâce à ses nombreuses interventions auprès des bolchéviques, il parvient à faire valoir auprès de Lénine l’intérêt de préserver ces collections uniques issues du génie russe « pour favoriser l’éducation du prolétariat ».

Retenue prisonnière au palais, la grande duchesse Elisabeth est contrainte de vivre dans un appartement de service mais ses conditions de vie restent correctes (photo 22). Il n’en sera, hélas, pas de même de ses 3 fils, les princes Igor, Constantin et Joann, tous trois jeunes officiers de l’ex-empereur, qui vont connaître une destinée tragique. Considérés comme « ennemis du prolétariat », ils sont arrêtés, envoyés en détention dans l’Oural, à Alapaievsk en mai 1918.

Deux mois plus tard, dans la nuit du 18 juillet 1918, ils sont brutalement emmenés et jetés vivants dans un puits de mine désaffecté dans lequel leurs bourreaux vont ensuite jeter des grenades. Grièvement blessés, les 3 princes vont agoniser pendant plusieurs jours avant de mourir dans d’horribles souffrances (photo 23).

Au début des années 20, la grande duchesse Elisabeth est libérée et parvient à rejoindre la Suède avec ses deux derniers enfants. Le palais de Pavlovsk est désormais vide de cette branche de la famille impériale qui l’avait construit, aimé et préservé de génération en génération. Mais grâce au zèle inlassable de Polovtsov, toutes ses collections sont préservées et le personnel qui en assure l’entretien et la protection peut poser fièrement devant la façade en 1938 (photo 24).

Parmi eux, en juillet 1941, une jeune conservatrice nommée Anna Zelenova (photo 25), est chargée, face à la progression de l’armée allemande, d’organiser l’évacuation des pièces les plus précieuses du palais. Meubles, tableaux, bronzes, porcelaines, objets d’art en ivoire, cristal ou bronze sont alors soigneusement emballés par une équipe de 30 personnes dans d’immenses caisses de bois avant d’être envoyées d’abord à Nijni-Novgorod, au coeur de la Russie, puis dans les caves de la cathédrale St Isaac à St Petersbourg.

Les précieuses statues de marbre des galeries et du parc sont, elles, enterrées dans le parc à plus de 3m sous terre pour les soustraire au pillage des armées nazies (photo 26) tandis que d’autres sont murées dans les caves. Mais l’arrivée imminente de l’ennemi contraint Anna Zelenova et ses équipes à quitter les lieux précipitamment alors même que seulement 402 caisses d’objets précieux ont pu être évacuées sur les milliers que contient le palais, soit à peine 40% des collections contenues dans le palais.

Le 17 septembre 1941, l’armée allemande occupe Pavlovsk. Le palais va alors connaître les heures les plus terribles de son histoire. Le premier étage est occupé par les officiers, les grands salons du rez-de-chaussée sont éventrés et transformés en garage tandis que l’aile nord abrite les baraquements de la garnison. A peine arrivés, les nazis pillent tout le mobilier et les objets d’art restants et les expédient aussitôt par train vers l’Allemagne.

Tout ce qui reste est systématiquement détruit ou vandalisé. Le parc est, lui, totalement dévasté puis truffé de milliers de mines. Sur les 100 000 arbres, 70 ooo ont été abattus pour fabriquer des défenses militaires. Quant aux fabriques et pavillons, ils sont soigneusement dynamités un à un laissant places à d’énormes cratères. (Merci à Néoclassique pour cette deuxième partie consacrée à Pavlovsk)