Dominant la colline de Yalta et le littoral de la mer noire, émergeant d’une forêt de pins, une imposant édifice blanc d’apparence italienne et flanqué d’une tour carrée, attire le regard : le palais de Livadia, dernière résidence d’été de l’empereur Nicolas II. (photo 1).

C’est en 1861 que commence son histoire lorsque l’empereur Alexandre II (1818-1881) (photo 2) fait l’acquisition en Crimée d’une villa construite par le comte Léon Potocki afin de l’offrir à son épouse l’impératrice Maria Alexandrovna (1824-1880), née princesse Marie de Hesse-Darmstadt (photo 3).

Le souverain pense en effet que le climat chaud de cette province du sud de l’Empire ne peut qu’être favorable à la santé fragile de son épouse.

Faisant aussitôt raser la villa existante, il confie alors à l’architecte russe d’origine suisse, Ippolito Monighetti, qui est alors en vogue à St Pétersbourg, la construction d’un palais d’été. Entre 1862 et 1866, ce dernier, en collaboration avec le paysagiste Clément Hekel, construit alors un édifice de facture classique, appelé « bolchoi dvorets » ou grand palais (photo 4) complété d’une chapelle (photo 5) et entouré par un vaste parc planté d’essences méditerranéennes et plongeant sur la mer Noire.

Mais rapidement le souverain le fait compléter d’un petit palais plus intime de style oriental, appelé « maly dvorets » ou petit palais, auquel s’ajoutent bientôt une maison du jardinier, des écuries, une école, une clinique et même une centrale électrique (photo 6).

C’est à partir de 1867 que l’impératrice Maria Alexandrovna vient séjourner dans ce qui devient son lieu de prédilection et qu’elle appellera dès lors sa « Douce Livadia » savourant la douceur du climat, le parfum des pins, la brise du soir et l’incomparable vue sur les flots bleus de la mer Noire.

Après avoir profité chaque automne pendant 13 ans du paysage idyllique de Livadia, la souveraine s’éteint le 8 juin 1880, âgée seulement de 56 ans.  A peine un mois plus tard, Alexandre II épouse morganatiquement sa maîtresse, la princesse Catherine Dolgorouki (1847-1922), (photo 7) de 29 ans sa cadette, avec laquelle il entretient une relation quasi officielle depuis 1866. L’empereur et sa seconde épouse ne profitent du palais que brièvement puisque l’année suivante, il est tragiquement assassiné.

Son fils aîné devient alors empereur sous le nom d’Alexandre III (1845-1894) en 1881. Un empereur qui, préférant la simple vie de famille aux obligations de la vie de cour et, après la mort brutale de son père, craignant pour la sécurité des siens, choisit alors de vivre hors de St Pétersbourg et notamment à Livadia.

Il vient y séjourner chaque année le plus souvent possible avec son épouse, l’impératrice Maria Feodorovna, née Dagmar de Danemark (1847-1928) et ses six enfants (photo 8).  L’empereur apprécie tant le lieu qu’il agrandit considérablement le parc dans lequel il fait planter des vignes qui, avec l’aide avisée du prince Léon Galitzine, vont donner un vin liquoreux qui devient célèbre, le Massandra.

C’est également à Livadia que le jeune tsarévitch Nicolas Alexandrovitch, alors âgé de 18 ans, prend plaisir à de longues promenades à cheval dans la campagne de Crimée (photo 9).

En octobre 1894, c’est au palais « bolchoi » de Livadia qu’il invite sa jeune fiancée, Alix de Hesse-Darmstadt, à séjourner (photo 10).

Quelques semaines plus tard, c’est dans le palais « maly » de Livadia qu’Alexandre III meurt brutalement à l’âge de 49 ans, victime d’une crise cardiaque (photo 11).

Livadia est alors délaissé pendant quelque temps par le nouvel empereur Nicolas II (1868-1918) auquel il rappelle trop le souvenir douloureux de la mort de son père. Le nouveau souverain et sa famille préfèrent pendant quelques années résider dans la datcha Alexandria que son père lui a fait construire en 1883 à Peterhof sur les rivages du golfe de Finlande (photo 12).

Ce n’est finalement qu’en 1909, après un voyage en Italie qui les a enthousiasmés, que les nouveaux souverains décident de villégiaturer à Livadia. Dans ce site qui leur rappelle la douceur de la Méditerranée, ils décident d’abord de démolir le palais « bolchoï ».Toutefois, par attachement pour son père, l’empereur choisit de conserver le palais « maly » dans lequel son père s’est éteint.

Nicolas II et Alexandra confient alors, en février 1910, à l’architecte le plus réputé de Crimée, Nicolas Krasnov, la construction d’un nouveau palais impérial d’été inspiré par la Renaissance italienne (photo 13).

Ce dernier va alors édifier un vaste édifice en granit de Crimée et marbre de Carrare et flanqué d’une haute tour florentine dominant l’édifice. Mais l’architecte y incorpore également les différentes influences que souhaite la famille impériale : byzantine, orientale, mauresque et gothique. Une diversité que l’on retrouve aussi bien dans le décor des façades dont chacune est différente que dans celui des appartements.

La construction de cet immense palais est réalisée dans le délai record de 17 mois : entamée en février 1910, les travaux sont achevés en septembre 1911 pour le premier séjour de la famille impériale.

Le nouveau palais se présente sous la forme d’un vaste quadrilatère de facture Renaissance italienne (photo 14) dominant le mer Noire. Toutes les façades, d’un style différent, sont ornées de nombreux balcons, loggias et terrasses. L’ensemble est dominé par une haute tour quadrangulaire, dite florentine. Enfin, au sommet de l’édifice, un belvédère offrant un point de vue unique ouvrant à 360° sur toute la Crimée. (Merci à Néoclassique pour cette première partie sur le palais Livadia)