En 1895, la France annexe l’île de Madagascar et abolit la monarchie. La reine Ranavalona III est envoyée en exil sur l’île de la Réunion. Elle est accompagnée par sa famille proche et des membres de la Cour dont Miss Clara Herbert.
Polyglotte anglais, français, malgache et 7 dialectes chinois, Miss Herbert de descendance irlandaise, travailla pour la famille royale de Madagascar de 1890 à 1920.
Elle avait conservé des archives, des photos et quelques objets qui seront mis aux enchères le 8 décembre prochain à Londres par la maison de ventes Kerry Taylor.
Une robe de la reine de Madagascar qu’elle porte ci-dessous sur un portrait officiel.
Sur la première photo, la reine Ranavalona de Madagascar posant sur le trône peu avant son départ en exil, coiffée de sa couronne qui se trouvait depuis au Musée de l’Armée à Paris et qui a été restitué au Madagascar ces jours derniers.
Deux ans après l’exil à la Réunion, la famille est rejointe par la princesse Rasendranoro (1860-1901) et ses deux enfants le prince Rakotomena et la princesse Razafinandriamanitra qui est âgée de 14 ans et est enceinte d’un soldat français. Elle accouche deux jours plus tard après son arrivée d’une fille prénommée Marie Louise. La princesse meurt cinq jours plus tard d’une infection.
La reine de Madagascar adopte aussitôt la fille de sa nièce. La reine n’a pas eu d’enfants.
Elle est mariée au Premier Ministre Rainilaiarivony. Il était en effet de tradition que les reines de Madagascar épousent les chefs de gouvernement. Il se disait d’ailleurs que le Premier Ministre Rainilaiarivony avait empoisonné l’époux de la reine (elle avait alors 22 ans) que pour pouvoir l’épouser à son tour.
Princess Razafinandriamanitra
En exil à La Réunion, la reine avec la princesse Ramisindrazana, sa mère et son neveu le prince Rakotomena.
La reine photographiée vers 1900 à Alger
La reine de Madagascar s’intéressait beaucoup à la mode
La famille en vacances en France en 1903. On distingue la petite princesse Marie Louise.
En 1899, une insurrection à Madagascar fait craindre une possibilité de restauration de la monarchie sur l’île. Les autorités françaises décident alors de déplacer la reine et les siens vers la France. La reine s’imagine en exil à Paris, elle qui raffole de la mode mais la destination est en fait l’Algérie. Elle ne tarde pas à devenir le centre d’attention à Alger.
La reine est morte 1917 des suites d’une ambolie à Alger. Elle n’avait jamais pu revoir son pays. Elle reposera 21 ans plus tard à Antananarivo, capitale du Madagascar.
La princesse Marie Louise a étudié en France et épousé dans les années 20 un ingénieur agronome dont elle divorça. Elle perçu une pension de l’Etat français et s’enrôla comme infirmière lors de la Seconde Guerre Mondiale. Elle est morte en 1948, la dynastie malgache s’est éteinte avec elle. (Merci à Bertrand Meyer)
30 novembre 2020 @ 06:51
Oui , merci à Bertrand Meyer de lever un pan du voile qui pour nous recouvre cette étrange histoire.
Quel contraste entre la façon dont la France traita les ex souverains des pays qu’elle a colonisés et celle qu’appliqua le Raj Britannique , pas tellement à notre honneur.
Une dame s’était manifestée il y a peu dont la famille appartenait à la noblesse malgache,pourrait-elle nous en dire davantage sur l’organisation de la société malgache avant la colonisation ?
30 novembre 2020 @ 06:52
Rappelons que ce n’est pas la couronne de la reine qui a été rendue récemment à Madagascar mais un ornement en forme de couronne qui était au Musée de l’Armée à Paris. La couronne de la reine elle se trouvait il y a plusieurs années au palais royal de Tananarive où elle a été volée et on n’en a plus de nouvelles.
30 novembre 2020 @ 08:00
Pas gaies toutes ces photos…
30 novembre 2020 @ 15:03
Miss Herbert est royale.
30 novembre 2020 @ 08:34
Une souveraine un peu oubliée aujourd’hui, mais très célèbre, voir « populaire » à « la Belle Epoque » car elle avait prêté son image pour des publicité « Lu » et apparaissait sur les boites de biscuits de la marque. Elle fait aussi une courte « apparition » dans « A l’ombre des jeunes filles en fleurs ». Proust utilise la reine comme l’exemple même du personnage célèbre, connu de tous: » le directeur se pencha vers ma grand’mère, et par amabilité (comme on montre le Shah de Perse ou la Reine Ranavalo à un spectateur obscur qui ne peut évidemment avoir aucune relation avec le puissant souverain, mais peut trouver intéressant de l’avoir vu à quelques pas), il lui coula dans l’oreille : « La Marquise de Villeparisis ».
Dans la biographie que l’historienne Marie-France Barrier a consacré à la reine Ranavalona III, on apprend que c’est Gallieni qui, sans en informer Paris, a suspendu la monarchie malgache, et décidé d’exiler la reine à la Réunion, tout c’est fait en une soirée, la reine n’a eu que quelques heures pour faire ses malles, et s’est trouvée en pleine nuit exfiltrée du rova d’Antananarivo. Tout était déjà accompli quand Paris en a été informé. Les malgaches n’ont pas oublié les méthodes musclées et brutales de Gallieni que la France coloniale de l’époque appelait pudiquement des « opérations de pacification »…
30 novembre 2020 @ 08:36
« tout s’est fait », pardon..
30 novembre 2020 @ 08:53
Un physique pas très avenant
30 novembre 2020 @ 15:05
Elle ressemble trait pour trait à la petite employée de maison malgache d’Antana que j’avais. Même stature aussi.
Georgia,je pense à toi😘.
30 novembre 2020 @ 18:34
Gracias Bertrand muy interesante !!!
30 novembre 2020 @ 09:12
Ce n est pas sa propre couronne sur la photographie c est la couronne du couronnement des rois malgaches
Il y a existé des couronnes de reine sans arches
30 novembre 2020 @ 10:27
Bonjour
La couronne restituée par la France est un ornement qui surplombait un dais et fait 30 cm de haut. Il ne s agit aucunement de la couronne de la Reine, qui a été volée à Madagascar il y a une 15aine d années.
30 novembre 2020 @ 10:34
J’ai aimé lire ce reportage sur cette reine méconnue et sa famille, merci Bertrand.
30 novembre 2020 @ 11:43
La démonstration est ici faite que notre ami Bertrand ne s’intéresse pas qu’à Maria Olimpia, Amelia, Jasmin Grace, et les soeurs Castro :)
30 novembre 2020 @ 12:37
Il se sacrifie en nous parlant de ces mondaines ,ce n’est pas à assez de thé .
1 décembre 2020 @ 15:33
Aïe aïe aïe,sa tasse de thé ,mon correcteur ne boit pas d’eau chaude .
30 novembre 2020 @ 16:07
Mais de quel droit chasser cette reine de son trône et l’envoyer en exil ? Cette souveraine a beaucoup de dignité ( on ne souriait pas à l’époque sur les photos ) .
Elle aimait la mode , je constate qu’en effet elle porte de très beaux vêtements .
N’est-ce pas cette souveraine qui aurait rencontré Pierre Loti et lui aurait dit-on , donné ce pseudonyme ?
1 décembre 2020 @ 11:44
Ne fut-ce pas plutôt la reine Pomare de Tahiti ?
J’avais gardé en souvenir que la reine Ranavalona n’était pas d’un caractère très facile.
1 décembre 2020 @ 19:03
C’est la reine Pomaré , en effet !
30 novembre 2020 @ 12:19
Chapeau la France ! Non seulement elle prend possession d’un état, dans sa haine de la monarchie, elle l’abolit, elle exile la souveraine sans ménagement et voilà, et cela prétend avoir instauré la déclaration des droits de l’homme !
30 novembre 2020 @ 13:45
La monarchie était déjà très fragile et les français lui ont donné le coup de grâce !
Il n y avait pas d’héritier et peu de descendance
30 novembre 2020 @ 13:45
Quel est le soldat français qui a osé mettre enceinte une gamine de 14 ans ???!
1 décembre 2020 @ 20:17
Mystère mais il y aurait aussi un « architecte -portraitiste » malgache parmi les possibilités !
30 novembre 2020 @ 14:27
Tristes époques que celles des colonisations où on se permettait de prendre un pays et de déposer ses souverains légitimes ! pourquoi ce désir de conquêtes , pourquoi ne pas laisser le droit aux peuples de disposer d’eux-mêmes ? quand ces peuples réclament leur souveraineté et qu’ils l’acquièrent , on sait ce que cela donne ,on en est encore victimes aujourd’hui !
30 novembre 2020 @ 15:14
Un grande merci pour ce très intéressant article sur la dernière Reine malgache. Néanmoins, il y a une erreur, la dynastie a une descendance pléthorique car la souveraine avait de très nombreux cousins. La Maison Royale est toujours très active et pas seulement dans le pays, un de ces membres le Prince Raymond Ranjeva a été Vice-Président de la Cour Internationale de La Haye.
30 novembre 2020 @ 15:24
De la a Miss Madagascar il y avait plus d´un pas…..
30 novembre 2020 @ 15:52
Alors j’attends avec impatience les commentaires des bigotes qui certainement trouveront légitime ce comportement sinistrement colonialiste
30 novembre 2020 @ 18:09
Des bigotes ? Vous voulez dire catholiques ? Et pourquoi donc ?
La colonisation de Madagascar est le fait de la 3eme république qui était foncièrement anti-cléricale .
Ne pas faire d’ anachronisme .
30 novembre 2020 @ 16:23
Merci, merci Bertrand. Beau travail de recherche. J’apprécie ❤.
30 novembre 2020 @ 16:28
Passionnant ! Un grand merci.
30 novembre 2020 @ 18:01
Triste histoire familiale pour cette Reine & les siens, tout ça pour la cause coloniale emmenée par Galliéni
30 novembre 2020 @ 18:13
Cet article richement illustré m’a intéressé. Tout le monde connaît le nom de la dernière reine de Madagascar mais c’est bien tout.
La colonisation de la grande île ne tentait plus de civiliser des peuplades retardées même si le développement du pays était sans doute à faire pour nourrir la population mais une tentation stratégique.
C’est la répression de la rébellion par les troupes coloniales de Gallieni qui fut atroce.
Il reste que le pays actuel a bien reculé depuis l’indépendance, quasiment dévasté par la misère générale et la gabegie. Un ami qui l’a traversé pour évaluation au profit d’un groupe d’investisseurs m’a dit qu’il faudrait deux générations pour le reconstruire.
30 novembre 2020 @ 20:06
Cette reine a beaucoup d’allure. Merci Bertrand pour ce reportage, on en apprend plus sur cette reine méconnue.
30 novembre 2020 @ 22:44
Et bien… on en sait un peu plus !
30 novembre 2020 @ 22:49
Il serait intéressant de comparer avec les stratégies américaines à Hawai dans une situation similaire?
1 décembre 2020 @ 00:27
Merci, Bertrand , intéressant , quoique triste …
1 décembre 2020 @ 01:47
Cela change des posts au sujet des Maria Olympia et consort.
Cette souveraine semblait fort élégante.
Quant aux colons français:on reconnait bien là leur arrogance.Quel contraste avec les Belges!,Mais un(e) historien(n)e pourra sans doute mieux en parler que moi .
1 décembre 2020 @ 14:47
Mais, êtes- vous sérieuse ? Les Belges ont fait comme les Anglais, les Français , les Espagnols, les Américains …etc …etc !
2 décembre 2020 @ 20:32
Avez-vous bien lu mon commentaire?A moins que je me sois mal exprimée.Mais j’ai lu que la colonisation française a été plus « dure » que la belge et les autres.Cela étant,cela reste quand même tout aussi critiquable.A mon avis.Néanmoins,il y a eu,si j’ai bonne mémoire ,repentance des Belges.
Mais encore une fois,je ne suis pas du tout spécialiste en Histoire,donc…
1 décembre 2020 @ 17:08
Contraste avec les Belges ?!! Connaissez-vous l’histoire de la République démocratique du Congo, anciennement Congo belge ?
2 décembre 2020 @ 20:33
Voir ma réponse à ML
2 décembre 2020 @ 17:20
Même sans être historien je sais que les Belges, avec les Allemands, les Ottomans et les Anglais, ont eu la politique coloniale la plus meurtrière. La France a renversé des sociétés et converti comme tous les autres, mais n’avait ni assez de colons pour peupler ses colonies comme les Anglais qui avaient comme politique d’éradiquer tous les indigènes ni de système analogue à la propriété personnelle du Congo belge par Leopold II.
1 décembre 2020 @ 07:39
Merci beaucoup Messieurs pour cette Article tres passionnant étant moi même un amoureux de Madagascar et de sont histoire .
1 décembre 2020 @ 09:29
Tous les commentaires s’indignent avec raison du cynisme et de la violence de la république française, qui salit et déprécie tout ce qu’elle touche, et surtout ce qu’elle détruit. Cependant il y a beaucoup à dire également sur les conditions dans lesquelles cette conquête s’est réalisée: l’invasion de Madagascar fut décidée par Gallieni en violation des ordres formels, au mépris de la santé des soldats français qui périrent par milliers de maladies et de malnutrition. Gallieni fut pourtant couvert d’honneurs par la république, alors qu’il méritait le peloton d’exécution, si la France avait eu un gouvernement digne de ce nom.
1 décembre 2020 @ 11:52
Merci pour cet article, je ne connaissais pas tous ces détails. Une autre époque de la France.
L’histoire de la princesse Razafinandriamanitra est dramatique, sa photo est touchante, elle était très jolie et si jeune.
2 décembre 2020 @ 00:16
Article passionnant, merci Bertrand Meyer.
2 décembre 2020 @ 02:20
La nièce de la reine, la princesse Razafinandriamanitra (III), c’est-à-dire
« l’enfant de Dieu », eut un fort tempérament dès avant 14 ans et on l’avait mariée le 12 juillet 1895 à un cousin Édouard Andriantsalama né en 1878, ancien de l’École Coloniale de Paris et fils aîné de SAR la princesse Ramatoa Philomène Ravero et de Philippe Razafimandimby, aide de camp de la reine. Ils se séparèrent à l’amiable en 1896. Son mari en avait plein le dos des lieutenants qui courtisaient sa femme.
Il fut commandant de la Miliatia Cadets et vice-gouverneur de Tsinjoarivo.
La princesse eut un certain nombre de soupirants car elle était très coquette. Elle s’en amusait et la reine qui l’adorait s’en amusait aussi jusqu’à un certain point toutefois. Les missionnaires se scandalisaient de ces amours tumultueuses.
En ce qui concerne le père de Marie-Louise il semble qu’on le connaisse aujourd’hui d’après une note manuscrite au fonds Mithridate des Archives d’Antananarivo citée par Marie-France Barrier, in Ranavalo, dernière reine de Madagascar, Le Nadir, Balland 1896.
Il s’agit du commandant Gérard, chef d’état-major de Gallieni et futur général. Augustin Gérard né à Dunkerque en 1857, mort en 1926, était alors divorcé de sa première épouse Élisabeth Vallois.
On avait aussi avancé le nom d’un commandant Charles, autre officier français, qui fut colonel puis officier d’ordonnance du général Régis Voyron.
On parla encore d’un architecte et portraitiste du nom de Ramananxirahwa qui aurait été peut-être un espion de Gallieni.
La pauvre jeune princesse ne se remit pas après la naissance de Marie-Louise et mourut en quelques jours d’une fièvre puerpérale.
Marie-Louise fut baptisée dans la religion catholique et non pas dans la protestante. À l’époque la famille royale vivait à Saint-Denis de la Réunion et la population y est essentiellement catholique, le baptême fut célébré dans la cathédrale de Saint-Denis en présence d’une foule nombreuse d’environ 1500 personnes. L’enfant fut pupille de la reine. Elle fut plus tard infirmière et reçut la Légion d’honneur pour sa conduite pendant le premier conflit mondial. Elle épousa le 24 juin 1921 un français l’ingénieur agronome André Bosshard et n’eut pas d’enfant. Ils divorcèrent. Elle a vécu tout le reste de sa vie en France et fréquenta la haute société à Paris. Elle était très élégante, on l’appelait Loulou.
Elle mourut le 18 janvier 1948 soit à Bazoches-sur-le-Betz (Loiret) soit à la villa des Sources à Montvilliers près du Havre. Elle fut inhumée au cimetière de Montreuil (Seine-Saint-Denis). Elle aurait pu être reine de Madagascar.
3 décembre 2020 @ 00:20
@Gérard, merci c’était très intéressant.
2 décembre 2020 @ 17:11
La politique coloniale française a été un désastre. On aurait tellement plus gagné à conserver les structures sociales existantes au lieu de renverser les monarchies ou fortement inciter les monarques régnants à abdiquer (comme Teriimaevarua III de Bora Bora ou Pomare V de Tahiti). Après tout notre modèle républicain laïque si rigide arrive quand même à accepter le concordat en Alsace-Moselle ou les trois royaumes coutumiers de Wallis-et-Futuna, je pense même que ça permet à la population locale de conserver son identité.
9 décembre 2020 @ 14:26
Le système français est par definition colonialiste, c’est pour cela que Galliéni a reçu des honneurs. Et la République Française a laissé derriere un pays comportement apauvri, qui ne cesse de s’apauvrir encore et encore.