Deuxième partie de la série consacrée par Patrick Germain aux alliances entre la Maison de France et la Maison d’Autriche de la Renaissance au Grand Siècle

V° – François Ier roi de France / Eléonore de Habsbourg archiduchesse d’Autriche, infante d’Espagne, reine du Portugal

François Ier (né sous le nom de François d’Orléans le 12 septembre 1494 à Cognac et mort le 31 mars 1547 à Rambouillet) est sacré roi de France le 25 janvier 1515 dans la cathédrale de Reims. Il règne jusqu’à sa mort en 1547. Fils de Charles d’Orléans et de Louise de Savoie, il appartient à la branche de Valois-Angoulême de la dynastie capétienne.

François Ier est considéré comme le roi emblématique de la période de la Renaissance française1. Son règne permet un développement important des arts et des lettres en France. Sur le plan militaire et politique, le règne de François Ier est ponctué de guerres et d’importants faits diplomatiques.

Il possède un puissant rival en la personne de Charles Quint, son beau-frère à partir de 1530, et doit compter sur les intérêts diplomatiques du roi Henri VIII d’Angleterre toujours désireux de se placer en allié de l’un ou l’autre camp. François Ier enregistre succès et défaites mais interdit à son ennemi impérial de concrétiser ses rêves, dont la réalisation toucherait l’intégrité du royaume. L’antagonisme des deux souverains catholiques entraîne de lourdes conséquences pour l’Occident chrétien : il facilite la diffusion de la Réforme naissante et surtout permet à l’Empire ottoman de s’installer aux portes de Vienne en s’emparant de la quasi-totalité du royaume de Hongrie.

Sur le plan intérieur, son règne coïncide en effet avec l’accélération de la diffusion des idées de la Réforme. La constitution de la monarchie absolue et les besoins financiers liés à la guerre et au développement des arts induisent la nécessité de contrôler et optimiser la gestion de l’État et du territoire. François Ier introduit une série de réformes touchant à l’administration du pouvoir et en particulier à l’amélioration du rendement de l’impôt, réformes mises en œuvre et poursuivies sous le règne de son successeur Henri II.

Le 4 juillet 1530, il épouse Éléonore de Habsbourg, archiduchesse d’Autriche, infante d’Espagne, reine du Portugal, née le 15 novembre 1498 à Louvain, Pays-Bas autrichien, morte le 18 février 1558 à Talavera la Real en Castille fut reine consort de Portugal de 1518 à 1521 et reine de France de 1530 à 1547.

Éléonore est la fille aînée de Philippe Ier le Beau, archiduc d’Autriche, et de Jeanne Ire la Folle, reine de Castille. Elle était la sœur de Charles Quint, de Ferdinand Ier, d’Élisabeth, reine consort de Danemark et de Suède, de Marie, reine de Hongrie et de Bohême et de Catherine, reine de Portugal.

Les projets de mariage à son intention étaient nombreux, afin de satisfaire la politique matrimoniale des Habsbourg, des pourparlers furent successivement entrepris pour la marier avec les rois d’Angleterre Henri VII, puis Henri VIII, les rois de France Louis XII ou François Ier et le roi de Pologne Sigismond Ier.

Elle grandit aux Pays-Bas, avec son frère, le futur empereur Charles Quint. Bien qu’infante de Castille, sa culture et sa langue maternelle sont le français. Elle épouse d’abord le roi Manuel Ier de Portugal de trente ans son aîné. Après trois années de mariage et huit années de veuvage, elle est mariée au roi François Ier de France. Devenue veuve, elle reçoit en douaire le duché de Touraine de 1547 à 1558, elle vit ses dernières années aux Pays-Bas aux côtés de sa sœur Marie qui en est la régente. Elle suit ensuite son frère en Espagne après son abdication et décède un an plus tard à l’âge de cinquante-neuf ans.

Leur union fut sans postérité.

VI° Charles IX roi de France / Eléonore de Habsbourg, archiduchesse d’Autriche

 

Charles IX est né à Saint-Germain-en-laye le 27 juin 1550 et mort à Vincennes le 30 mai 1574. Il est le deuxième fils de Henri II et de Catherine de Médicis. Il succède à l’âge de 10 ans, à son frère, François II.

Son règne fut celui des guerres de religion, dont l’épisode le plus célèbre et le massacre de la Saint-Barthélémy, le 24 août 1572. On ne sait si le roi et sa mère y ont une responsabilité directe.

La paix de Saint-Germain, en 1570, avec le roi d’Angleterre et l’empereur romain germanique, Maximilien II, lui permet d’épouser Eléonore de Habsbourg, archiduchesse d’Autriche.

La bataille de Lépante eut lieu sous son règne en 1571. Bien que prince cultivé, son règne ne laisse qu’un souvenir de désordre et de massacres.

Le 22 octobre 1570, il épouse Elisabeth de Habsbourg, archiduchesse d’Autriche, fille de l’empereur Maximilien II et de Marie de Habsbourg, infante d’Espagne. Elle est née le 5 juillet 1554 à Vienne et morte le 22 janvier 1592.

Ne parlant pas le français, elle se tint à un rôle purement protocolaire à la cour de France, dominée par sa belle-mère. Elle ne prit aucun parti politique ou religieux.

Au début de sa vie de couple le Roi semble lui donner de l’affection. Lorsqu’elle attrape, en janvier 1571, une bronchite, il reste près d’elle et fait appel à des jongleurs pour la distraire puis l’emmène à la foire de Saint-Germain. Contrairement à son époux, la Reine ne semble pas très joueuse. Après la naissance de leur fille, le roi s’éloigne, préférant la chasse et laissant sa mère Catherine de Médicis s’occuper de la politique. Malgré cela, lorsque le roi tombe malade, la Reine reste près de lui, priant et pleurant. Son époux est un homme psychologiquement fragile qui poursuit la liaison qu’il entretenait avant son mariage avec Marie Touchet, une jeune fille de petite noblesse avec laquelle il eut un fils. Le couple royal eut une fille Marie-Elisabeth qui mourut jeune. A la mort de Charles IX, n’ayant plus rien à faire en France, elle quitta Paris pour Vienne, laissant sa fille, malgré elle, car elle était Fille de France. Elle-même ne se remaria pas car “Les reines de France ne se remarient pas.” Il a cependant été question de la marier à son beau-frère Henri III, qui ne voulu pas, et à son oncle et beau-frère, Philippe II d’Espagne dont elle ne voulut pas. Elle porta le deuil de Charles IX toute sa vie.

Elle fonda un monastère de Clarisses, près de Vienne où elle s’installa, et l’église de tous les saints à Prague, tout en continuant de doter des églises et les pauvres, tout en nourrissant Vienne de sa bienfaisance.

Elle meurt le 22 janvier 1592, à 37 ans dans la plus grande dévotion. Selon ses vœux, elle demande à être ensevelie au ras de terre, dans le monastère des clarisses et être escortée par deux cents pauvres, habillés à ses frais.

VII° Louis XIII roi de France / Anne de Habsbourg, Archiduchesse d’Autriche, infante d’Espagne

Louis XIII, dit « le Juste », fils d’Henri IV et de Marie de Médicis, né le 27 septembre 1601 au château de Fontainebleau et mort le 14 mai 1643 au château neuf de Saint-Germain-en-Laye, est roi de France et de Navarre de 1610 à 1643. Son règne, dominé par la personnalité du cardinal de Richelieu, principal ministre d’État, est marqué par l’affaiblissement des grands et des protestants, la lutte contre la maison d’Autriche et l’affirmation de la domination militaire française en Europe pendant la guerre de Trente Ans.

Louis XIII et Richelieu tentent de briser l’encerclement Habsbourg du Royaume de France. Il est difficile de dire qu’ils y soient parvenus. Il faudra attendre la Guerre de Succession d’Espagne pour voir les Bourbons libérés de l’encerclement autrichien. Il tente de briser l’influence des Grands, mais là aussi, ce fut choix difficile et ce fut son fils qui y parviendra en installant la cour à Versailles.

Il épouse par procuration le  18 octobre 1615 à Burgos Anne Marie Maurice de Habsbourg, infante d’Espagne, infante du Portugal, archiduchesse d’Autriche, princesse de Bourgogne et princesse des Pays-Bas, née le 22 septembre 1601 à Valladolid en Espagne et morte le 20 janvier 1666 à Paris d’un cancer du sein.

Elle est la fille du roi Philippe III (1578-1621), roi d’Espagne (1598-1621), et de l’archiduchesse Marguerite d’Autriche-Styrie (1584-1611).

Anne est l’aînée du couple royal espagnol. Contrairement à l’usage du temps qui prônait une séparation des enfants de leurs parents, Anne mène une vie calme et ordonnée, entourée de l’affection de sa famille. Elle grandit au palais royal de l’Alcazar à Madrid où ses parents, très pieux, lui donnent une forte éducation religieuse. La jeune Anne visite des couvents et passe des journées entières penchée sur des reliques. Elle s’attache à ses frères et sœurs et plus particulièrement à Philippe (futur Philippe IV d’Espagne) et à Marie-Anne. Mais la famille royale espagnole subit un drame en 1611 : la reine Marguerite meurt subitement à l’âge de 27 ans en mettant au monde son huitième enfant. Malgré son chagrin, la jeune infante s’occupe de ses frères et sœurs, qui l’appellent « Maman ».

Bien que les jeunes mariés n’aient que quatorze ans, Marie de Médicis, alors régente, ne veut pas qu’on puisse remettre en question cette union et s’ingénie à ce que ce mariage soit immédiatement consommé, pour des raisons politiques. Cependant, du fait de l’inexpérience des mariés la nuit de noces ne semble pas avoir été une réussite, que le jeune roi, a vécu comme une véritable humiliation. Il en garda longtemps rancune à sa mère, et n’entretint plus avec son épouse de rapports charnels pendant les quatre années suivantes, lui rendant néanmoins visite matin et soir, comme le voulait la coutume de l’époque.

Installée dans les appartements du Louvre avec sa suite, Anne d’Autriche, délaissée, reçoit cependant tous les égards dus à son rang. D’une part, Marie de Médicis continue à porter avec hauteur le titre de reine de France, sans la moindre déférence à l’égard de sa belle-fille. D’autre part, Louis XIII continue de se désintéresser d’elle, bien qu’elle soit considérée comme une belle femme. Le roi, de nature complexe, est timide, ce qui l’empêche de s’accorder avec elle. Entourée par une petite cour peuplée d’une centaine de dames espagnoles, elle continue à vivre à la mode espagnole et son français est encore très hésitant. Anne éprouve ainsi des difficultés à communiquer avec sa nouvelle famille. Enfin, Anne d’Autriche partage avec son époux une timidité et une inexpérience qui n’arrangent pas la situation.

 

Conscient du problème diplomatique et dynastique que cause l’indifférence du roi à l’égard de la reine, le duc de Luynes, nouveau favori, tente d’y remédier. Tout d’abord, il fait chasser la cour espagnole d’Anne d’Autriche et remplacer les dame d’atours espagnoles par des françaises, dont Marie de Rohan, la propre femme du duc de Luynes , future duchesse de Chevreuse, surintendante de la maison de la Reine, la princesse de Conti, Madame du Vernet, une sœur de Luynes et Gabrielle-Angélique de Verneuil, la fille naturelle d’Henri IV et d’Henriette d’Entragues.

Le duc organise des rendez-vous intimes entre Anne et le roi. Sous l’influence de Mme de Luynes, la reine commence à s’habiller et à se comporter comme une française. On lui fait porter des décolletés. Elle ne portait jusque-là que des robes espagnoles ne laissant voir aucune partie du corps. On considérait d’ailleurs Anne comme trop rigide et trop prude. Au printemps 1619, Luynes finit par forcer le roi à coucher avec la reine. À partir de ce moment, les relations entre Anne et Louis XIII ne cessent de s’améliorer et Louis reste longuement à son chevet lors de sa grave maladie en janvier 1620. Toutefois, Anne n’est pas admise au Conseil, alors que la reine mère y siège, la privant de tout rôle politique, contrariant ainsi les volontés de son père.

Une des grandes affaires de la vie de la reine Anne est celle du duc de Buckingham. Le duc est épris de la reine, au point d’en faire des folies. Mais elle ne l’est pas et il faut toute l’imagination d’Alexandre Dumas pour lui prêter un tel sentiment à l’affaire, qui a eu un retentissement énorme tant sur la plan national qu’international.

Marie de Rohan joue également un rôle néfaste dans les relations du couple. Elle entraîne la reine dans une série de complot contre le cardinal de Richelieu et donc contre le roi.

En 1635, la France déclare la guerre à l’Espagne, plaçant Anne d’Autriche dans une position encore plus délicate. En effet, la correspondance secrète qu’elle entretient avec le roi d’Espagne Philippe IV, son frère, va au-delà des nécessités de la simple affection fraternelle. Deux ans plus tard, en août 1637, Anne est suspectée. Sur l’ordre de Louis XIII, une enquête policière est menée sur les activités de la Reine. On perquisitionne l’abbaye du Val-de-Grâce où Anne a l’habitude de se réfugier. Comble de l’humiliation, Louis XIII l’oblige à signer des aveux concernant cette correspondance, et son courrier est désormais ouvert. Son entourage est épuré, la trop remuante duchesse de Chevreuse doit s’enfuir en Espagne, et ses sorties surveillées.

Enfin après vingt huit ans de mariage, naît l’héritier tant attendu. On a beaucoup spéculé sur cette naissance “miraculeuse” mais l’enfant est bien du roi comme l’ont attesté les dernières analyses ADN faites parmi les princes de l’actuelle Maison de Bourbon dans ses différentes branches.

Un deuxième garçon nait deux ans après, Philippe, duc d’Orléans.

La mort de Louis XIII en 1648 ne rendit pas toute sa sérénité à la reine mais s’appuyant sur le cardinal de Mazarin, dont il est dit qu’il a été son mari, elle trouve un véritable rôle politique et assure l’avenir dynastique de son fils.

VIII° – Philippe IV roi d’Espagne / Elisabeth de Bourbon, Fille de France.

 

Philippe IV (Valladolid, 8 avril 1605 – Madrid, 17 septembre 1665), dit le Grand ou le « roi-Planète », roi d’Espagne et des Indes après la mort de son père Philippe III, du 31 mars 1621 à sa mort. Il porta également les titres de roi des Deux-Siciles, roi de Portugal, souverain des Pays-Bas.

Les toutes premières années du règne de Philippe IV virent le renforcement de la prééminence des Habsbourg en Europe, mais les guerres constantes qu’il dut mener conduisirent au déclin de la monarchie espagnole. Cependant, si l’histoire l’a retenu comme un piètre homme politique, Philippe IV compte parmi les plus grands mécènes et les plus grands collectionneurs de son temps.

Il est le frère cadet de la reine de France, Anne.

Le double mariage avait pour objet de resserrer les liens entre les deux maisons et mettre fin à leurs luttes. Il n’en fut rien, bien au contraire.

Sous la conduite du cardinal de Richelieu, Louis XIII reprit la politique anti-espagnole de la France. Il soutint tout d’abord, en leur donnant des armes et des moyens financiers, les Protestants du Saint-Empire en guerre contre les Habsbourg. Puis, en 1635, la France déclara la guerre à l’Espagne. Les Français furent tout d’abord défaits, en 1635, à la bataille de Corbie, menant l’armée espagnole du cardinal-infant aux portes de Paris, qui dut cependant se retirer par manque de ressources. Dans le sud, l’armée espagnole est arrêtée à Leucate en 1637.

Les Français réagirent en envahissant le nord de l’Italie, dans la Valteline, coupant les routes de communication espagnoles entre l’Espagne et les Pays-Bas. En 1639, Louis XIII porta ses efforts sur la Catalogne qu’il envahit après avoir assiégé à trois reprises (1640, 1641 et 1642) et finalement prit la forteresse de Salses : il reçut de la Généralité en 1640 le titre de « comte de Barcelone, de Roussillon et de Cerdagne ». Mais l’échec des espagnols fut complet à la bataille de Rocroi en 1643 où, si la cavalerie put s’enfuir, l’infanterie fut massacrée ou capturée. A nouveau défait, en particulier à la bataille des Dunes en 1658, Philippe IV fut poussé à la paix.

Le traité des Pyrénées, en 1659, mit fin à 24 ans de guerre contre la France. Il fut négocié par le cardinal Mazarin et don Luis de Haro et signé le 7 novembre 1659 sur l’île des Faisans, au milieu de la Bidassoa. Par ce traité, l’Espagne perdait, aux Pays-Bas méridionaux, le comté d’Artois, ainsi que plusieurs places de Flandre, du Hainaut et du Luxembourg, ainsi que le Roussillon. Enfin, le traité prévoyait le mariage de Louis XIV avec l’infante d’Espagne Marie-Thérèse d’Autriche, fille aînée du roi d’Espagne et nièce de la reine-mère Anne d’Autriche. Le traité consacrait l’affaiblissement de la couronne d’Espagne et la prépondérance de la France en Europe.

Il épouse le 25 novembre 1615, à Bordeaux, Elisabeth de Bourbon, Fille de France. Elle est la fille de Henri IV et de Marie de Médicis, et donc la soeur de Louis XIII.

A dix-huit ans, elle commence à donner des enfants à son mari de façon régulière. Mais beaucoup moururent en enfance. La seule qui survécu fut Marie-Thérèse, dont il sera parlé plus tard.

Affaiblie par ses multiples grossesses et ses fausses couches, Elisabeth décède le 6 octobre 1644 en accouchant de son neuvième enfant.

Il est fort probable que Philippe IV ait transmis à sa femme une maladie vénérienne qu’il aurait contractée avec une de ses maîtresses. Cette maladie pourrait expliquer certaines fausses couches, mais les mariages consanguins dont est issu Philippe IV pourraient également en être la cause.

Élisabeth a souffert en silence de la mort de ses enfants et de ses fausses couches, et se sentait d’autant plus mal que certaines maîtresses de son mari lui donnaient des enfants. Sa culpabilité se ressent à travers les lettres qu’elle envoya à son frère Louis XIII et sa belle-sœur Anne d’Autriche.

Elle souhaitait que Marie-Thérèse épousât le Dauphin. Son souhait fut exaucé. (A suivre)