L’École supérieure des arts et techniques de la mode ou ESMOD est une école privée formant aux métiers de la mode. Elle se situe au n°12 de la rue de la Rochefoucauld à Paris. Elle a été fondée en 1841 par Alexis Lavigne ce qui en fait la plus ancienne école de mode au monde.

Alexis Lavigne est une figure historique de la mode française, un tailleur visionnaire qui a complètement révolutionné le monde de la couture.

Le groupe ESMOD dispense en trois ans un enseignement en stylisme et modélisme. Nous sommes en 1840 à Paris. Alexis Lavigne, un jeune tailleur de 29 ans s’installe rue des Petits Champs pour réaliser des vêtements sur mesure pour les messieurs.

Curieux et inventif, il a fait son apprentissage en faisant un tour de France en tant que Compagnon chez des Maîtres Tailleurs d’Habits. Il tire de cette expérience la conclusion suivante : la majorité de ses confrères travaille de manière routinière et approximative, d’où une perte de temps, d’efficacité et un résultat qui n’est pas toujours satisfaisant.

En effet, à cette époque-là, et depuis déjà bien longtemps, les tailleurs travaillent à partir d’un modèle original qu’ils adaptent tant bien que mal aux mensurations du client. Alexis Lavigne propose d’appliquer la méthode inverse : partir du corps pour aboutir au vêtement à réaliser.

Alexis Lavigne, tailleur à Paris, publie sa première « Méthode du Tailleur » en 1841, et reçoit des élèves chez lui pour leur apprendre son art. C’est la création de l’école. En 1845, il fait breveter son système de coupe :« Barème du tailleur ».

Alexis Lavigne expose les principes généraux et particuliers, schémas à l’appui, pour tailler les redingotes, les pantalons, etc., et surtout pour tenir compte des différentes morphologies de la clientèle : positions voûtées ou cambrées, silhouettes ventrues et autres. En 1847 il dépose un brevet pour le mètre-ruban imperméabilisé

« La science du tailleur doit savoir s’adapter à toutes les morphologies et c’est bien ce qui différencie cet art de la confection : un vêtement tout prêt, constitué sur un homme aux mensurations standard, s’il n’est pas adapté, ne sera pas seyant sur un homme efflanqué et voûté, pas plus qu’il n’ira à un monsieur petit et ventripotent ! » Lavigne ne cesse d’attirer l’attention de ses lecteurs et élèves sur ce point.

A l’heure où il n’existe que de simples mannequins d’osier, il songe à réaliser des bustes d’après nature afin de faciliter le travail du tailleur. Cet artifice permettrait, selon lui, d’élaborer le vêtement en tenant compte de l’éventuelle difformité du client. Le procédé éviterait de longues séances de retouches lors des essayages. À une époque où beaucoup de tailleurs parisiens habillent une clientèle étrangère, ce serait un moyen de travailler à distance. Un buste moulé sur nature, une bonne fois pour toutes.

Reste donc à trouver la solution technique pour réaliser ce fameux buste sur-mesure. En 1835, un ferblantier (métier qui consistait à fabriquer des outils ou ustensiles en fer-blanc) a l’idée de créer un mannequin en fil de fer.

Cela inspire un Anglais, le Comte Dunin, qui présente à l’exposition universelle de Londres un mannequin composé de plus de 7000 pièces métalliques, qui peut s’ajuster à différentes morphologies. Un véritable chef-d’œuvre, mais dont le coût de revient exorbitant dépasse de très loin le budget d’investissement des tailleurs !

En 1849, Alexis Lavigne a une idée beaucoup moins spectaculaire que l’invention de Dunin, mais qui va révolutionner le monde de la confection : il crée un buste en carton qu’il recouvre de tissu et rembourre de molleton pour reproduire les proportions du client ou de la cliente.

Autre avantage : le rembourrage permet de draper et d’épingler le tissu à même le mannequin. En 1854, il dépose un brevet pour la fabrication de bustes mannequins moulés sur plâtre. Puis il en lance la fabrication .
En 1860, il fait un ajout à ce brevet pour une boîte étui

Habile à communiquer, en 1857, il fait le moulage du buste de l’impératrice Eugénie, dont les formes dit-on, sont exemplaires.

Il lui offrira ce buste dans un élégant caisson de style Boulle, servant au transport autant qu’à la présentation et bénéficiera en retour d’une accréditation, comme « tailleur-amazonier » de l’impératrice (celui qui crée des vêtements d’équitation, un statut très prestigieux à l’époque

Le buste mannequin est invente tel que nous le connaissons encore aujourd’hui. En inventant le buste mannequin de couture et le centimètre souple, il participa à la mise en place du passage d’une confection artisanale à une production industrielle permettant ainsi la démocratisation de la mode jusqu’alors réservée à une élite

Précurseur sur son temps, il voit s’annoncer, avec l’implantation des premiers grands magasins parisiens, les prémices du prêt-à-porter. Prenant conscience qu’il est en train de faire fausse route avec le sur mesure, Alexis Lavigne décide alors de passer à une standardisation de ses bustes.

Il explique :« La majorité des dames ayant une conformation régulière, nous sommes partis de ce principe et avons formé des séries de la plus petite à la plus grande taille que nous destinons au commerce ».

Ses bustes sont donc déclinés dans différentes tailles « standard ». C’est à partir de cette idée visionnaire qu’ont été créées les tailles de prêt-à-porter d’aujourd’hui.

A la mort d’Alexis Lavigne, en 1880, sa fille Alice Guerre reprend la direction de l’école, qui s’appelle alors école Guerre Lavigne, et l’ouvre à un nouveau public : celui des jeunes filles.

En 1976, l’école change de nom : d’école Guerre-Lavigne elle devient l’ESMOD.

C’est dans un magnifique hôtel particulier du XIXème siècle, de 3000 m2, construit autour d’un atrium central, que se répartissent, sur 5 étages, les 15 salles de stylisme et de modélisme ainsi qu’une salle de montage, une salle de MAO (Modélisme Assisté par Ordinateur), un centre de documentation, une tissuthèque, une salle d’étude et un espace pour se restaurer.

Le bâtiment, remarquable en lui-même, s’inscrit dans un contexte de monuments historiques. Le premier travail pour ce projet de rénovation et de réhabilitation, était de se débarrasser des rajouts qui ont alourdi le bâtiment au fil de ses usages successifs, notamment en bureaux. Après dépose de l’ensemble apparaissent les hauteurs, la lumière, les parquets et mosaïques, le marbre et les moulures qui créent un cadre riche et une échelle intéressante.

Le projet architectural exprime une volonté de simplification et l’affirmation de lignes contemporaines. Il a consisté à mettre en valeur le fantastique atrium de type Eiffel avec sa coupole, un espace rare à Paris, qui devient un lieu de rencontre, d’accueil, et aussi le support d’événements. Les ateliers de stylisme et de modélisme doivent garder la possibilité d’être modulables et fournir un équipement spécifique comme des presses ou des machines à coudre. Les larges coursives deviennent des lieux d’exposition et de vie.

Le réseau ESMOD compte aujourd’hui cinq écoles en France à Paris2,3, Bordeaux, Lyon, Rennes et Roubaix et 15 autres écoles à travers le monde. (merci à Guizmo)