Voici ce que l’on appelle un « beau livre » qui vient de paraître aux éditions Lacurne. Il s’agit de l’autobiographie (parue en 2004) traduite de l’anglais du baron Alexis de Redé (1922-2004), l’un des personnages les plus emblématiques de ce que l’on appelait la Cafe Society, ce noyau de personnes fréquentant cercles mondains et culturels de New York à Paris en passant par Londres et la Riviera, pendant l’entre deux guerres.

Le baron Alexis de Redé dont l’histoire a été narrée sous la plume de l’auteur anglais Hugo Vickers qui connaît parfaitement les us et les codes de ce monde d’élégance feutrée, commençait l’évocation de sa destinée hors du commun par ces mots : « Je vis seul et voici que j’ai décidé de raconter mo histoire, ou du moins une partie de mon histoire. J’ai conscience de mener une existence peu banale, et bon nombre de personnes ont sans doute dans leur vie des priorités différentes des miennes. Quoiqu’il en soit, il est toujours intéressant de lever le voile sur une existence un peu singulière, et qui sait : peut-être que quelqu’un, découvrant un peu ce qu’a été ma vie, saura ensuite comment rendre la sienne plus riche et plus excitante. »

Son père Oskar von Rosenberg était mi Autrichien et mi Hongrois. Il fut créé baron de Redé en 1913 par l’empereur François Joseph d’Autriche. Redé était alors en Transylvanie. Après la Première Guerre Mondiale et le démembrement de l’empire, Redé se retrouva en Roumanie, la famille opta alors pour devenir sujets de la Principauté de Liechtenstein.

Une enfance marqué par la disparition précoce de sa mère, des études au Collège huppé Le Rosey où il côtoya le prince Rainier de Monaco et le shah d’Iran, le suicide de son père en raison d’un gros revers de fortune et le choix de partir au moment de la Seconde Guerre Mondiale à New York.

Alexis de Redé, polyglotte, y trouva progressivement ses marques jusqu’à a rencontre avec Arturo Lopez de nationalité chilienne, grand collectionneur à la tête d’une importante fortune.

Alexis de Redé évolue alors dans un monde de raffinement, d’élégance qui lui sied parfaitement. Cette rencontre fut déterminante pour lui.

Arrivé en France en 1946, le baron ne tarde pas à retrouver des amis communs et développe un réseau de connaissances mais aussi de fidèles amitiés dont la baronne Marie Hélène de Rothschild.

Le lecteur est plongé dans le tourbillon de l’enchantement de fêtes et de bals qui n’existent définitivement plus. Car l’œuvre de la vie de Redé c’est l’hôtel Lambert situé sur l’île Saint-Louis grâce à ses amis Rothschild. On y donna des bals mémorables dont le célèbre bal oriental en 1969 en présence de la future reine Margrethe de Danemark, de Salvator Dali, du maharadjah de Baroda ou encore l’Aga Khan.

Alexis de Redé disparu en 2004, est en définitive peu connu du grand public mais pourtant il a côtoyé intimement tant et tant de personnalités : Jean Cocteau, Hélène Rochas, le duc et la duchesse de Windsor, Christian Dior, Barbara Hutton, Andy Warhol, Louise de Vilmorin, Salvador Dalí, Jacqueline de Ribes, Rudolf Noureev, Margrethe de Danemark, Audrey Hepburn, le président Pompidou,…

Un homme charmant qui a laissé un souvenir indélébile chez ceux qui l’ont connu. Ainsi, la princesse Barbara de Yougoslavie, née princesse de Liechtenstein, l’évoque avec beaucoup de nostalgie lorsque Noblesse et Royautés l’a questionnée à ce sujet. Tous deux avaient de plus un point commun : citoyens du Liechtenstein. A son décès, homme de goût, le baron Alexis de Redé lui laissa une paire de lunettes d’opéra. Un détail à, l’image du baron de Redé.

Aujourd’hui, ce style de vie est une page d’Histoire qui s’est définitivement refermée mais s’y plonger au gré de cette si agréable narration, sur un ton si naturel que tout vous semble familier, procure un réel plaisir pour celles et ceux qui se passionnent tout simplement pour l’Histoire et le goût du beau.

« Baron de Redé. Souvenirs et portraits », Hugo Vickers, traduit en français, Lacurne, 2017, 312 p., 225 photos