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Le nom propre désigne une ville qui affiche un beau succès touristique depuis quelques années. Le nom commun désigne un célèbre vin. Cette ville et ce vin sont évoqués sur des pièces portugaises en euros. Commençons par le nom propre. La seconde ville du Portugal a célébré en 2013 les 250 ans de la Tour des Clercs (« Torre dos Clérigos »), et le pays a frappé à cette occasion la pièce commémorative ci-dessus. La Tour des Clercs, c’est en fait le clocher d’une église construite dans le style baroque en 1763. Haute de 76 m, elle avait un temps servi de phare pour les bateaux rentrant au port.

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À l’arrière-plan de la pièce figure le pont D. Luis, mis en service en 1886. Il avait été construit par un disciple de Gustave Eiffel, Théophile Seyrig. Luis était l’époux de Maria Pia de Savoie et le grand-père de D. Manuel II, dernier Roi de Portugal. Comme il n’est pas interdit d’être prosaïque, je mentionne aussi qu’il était à l’origine de la Caixa Geral de Depósitos, l’une des principales banques portugaises.

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Parlons à présent du nom commun, c’est-à-dire de ce digestif que de nombreuses personnes consomment comme un apéritif – vaste débat.

Son origine remonte aux conflits franco-anglais du XVIIe siècle. L’Angleterre avait frappé d’embargo les vins français et importait massivement des vins d’autres pays européens. Mais le vin d’origine portugaise supportait mal le voyage et arrivait imbuvable en Angleterre. Les marchands anglais avaient trouvé la solution en lui ajoutant un alcool fort, ce qui retardait sa fermentation mais augmentait sa teneur en alcool et sa douceur, faisant de lui un produit différent d’un vin de table ordinaire.

Les premiers négociants en porto étaient donc principalement des Anglais, et certains d’entre eux avaient acquis des vignobles dans le Nord du Portugal. Les traces de cette activité et de cette présence anglaises sont encore visibles actuellement, par exemple dans le nom de certaines marques (Offley, Dow’s, Osborne) ou dans les appellations des différentes qualités (ruby, tawny, vintage).

Le porto est représenté de manière indirecte sur une pièce en euros : ci-dessous figure la pièce commémorative de 2007, qui célèbre la Présidence portugaise du Conseil de l’Union européenne et qui a choisi le chêne-liège (Quercus suber) comme visuel.

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Le liège produit par cet arbre a de multiples applications, dont l’une des principales est la confection de bouchons. Cela est dû à ses propriétés en matière d’étanchéité aux liquides et de résistance à la compression. Le commerce de porto était et est toujours un excellent marché pour les bouchons, donc pour le liège.

La pièce est très généreuse, le feuillage de l’arbre emplissant la plus grande partie du champ. Le fait que le chêne-liège ait été choisi pour illustrer la Présidence portugaise du Conseil dit assez l’importance qu’il a dans l’économie portugaise (le Portugal à lui seul compte pour plus de 50 % des exportations mondiales de liège) et fait preuve d’un petit décalage qui n’est pas pour déplaire.

Pour achever la comparaison entre le nom propre et le nom commun : la ville fait venir des touristes de plus en plus nombreux, alors que le vin s’exporte dans le monde entier. Destin intéressant. (Merci à Sedna pour ce 60ème article dans la rubrique numismatique de l’euro)