Née en 1697 sous Louis XIV, Madame du Deffand fait son entrée dans le monde à la faveur des fastes et du libertinage de la Régence. Nature rapide et déliée, douée pour la conversation brillante et l’art de la repartie ciselée, elle fait de son salon du couvent Saint-Joseph l’un des plus prestigieux de l’époque. Elle traverse le long règne de Louis XV et meurt en 1780, au moment où les premiers désordres populaires ébranlent un système que la Révolution ne tardera plus à balayer.


Sa correspondance est une vivante mémoire historique. Inlassablement, elle s’entretient avec les grands esprits de son temps : Voltaire, Montesquieu, le président Hénault, d’Alembert et, surtout, Horace Walpole. Ses lettres regorgent de noms propres, d’anecdotes, de relations d’événements, de portraits vibrants de méchanceté et de drôlerie. Mais elles témoignent aussi, comme déjà sa vie mondaine, d’un besoin vital de compagnie : pour éviter le tête-à-tête avec elle-même, fuir le sentiment lancinant de la proximité du néant et une disposition maladive à l’ennui. Besoin qui s’exacerbe encore quand elle devient aveugle, en 1752. Madame du Deffand observe le monde et elle-même avec lucidité. Consciente de son talent, elle ne prétend pourtant pas construire une œuvre : elle n’écrit que pour son plaisir et pour réaffirmer sans cesse sa liberté. (Merci à Alberto)

« Madame du Deffand. Lettres (1742-1780), Editions Mercure de France, collection Le Temps retrouvé, 2018, 992 p.